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 Requiem for the American Dream (Sid)

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Diane Parker-Wright
Diane Parker-Wright
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Allégeance : Fervente défenseuse des intérêts humains, plus encore de ceux des Parker-Wright - du moment que ces derniers continuent de se ranger du bon côté, le sien.
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MessageSujet: Requiem for the American Dream (Sid)   Requiem for the American Dream (Sid) EmptyDim 9 Aoû - 23:12


Requiem for the American Dream
You’re born poor, you work hard, you get rich. The idea that it is possible for everyone to get a decent job, buy a home, get a car, have their children go to school... It’s all collapsed. (N. Chomsky)

Diane mêlait au racisme un évident mépris de classe qui lui fit plisser du nez lorsqu’elle posa les yeux sur cette maison délabrée, ruine du rêve américain. Derrière le volant d’une voiture qui sentait encore le cuir neuf, arrêtée sur le trottoir d’en face, elle resta quelques secondes à observer ce tableau sordide. C’était donc là que se terraient les laissés pour compte d’une Amérique estropiée. Le coin de sa bouche esquissa un tic agacé, car elle savait bien qu’il était moralement regrettable que le premier sentiment qui lui vienne soit de l’écœurement. Mais c’était plus fort qu’elle. Elle tenait en une certaine estime la bonne classe populaire, celle qui partait de pas grand-chose mais travaillait dur et sans faire trop de bruit pour s’en sortir, conservant dans sa petite ascension une diligence pour ces 1% qui, bien sûr, incarnaient l’ultime modèle de réussite au pays de l’ultra capitalisme. Le reste lui inspirait un mélange de pitié et de dégoût. La première était une forme bâtarde et dédaigneuse de la compassion si chère à l’éthique protestante ; le second, le pendant quasi naturel de cet esprit du capitalisme qui tenait l’argent et l’ascétisme en haute estime. Car le problème de certains ratés n’était pas tant leur manque de moyens, cela ne constituait pas une tare en soi, c’était avant tout la façon dont ils étalaient leurs échecs, cette manière quasi ostentatoire avec laquelle ils assumaient leur médiocrité, comme s’ils avaient purement et simplement abandonné.
Mais à présent qu’elle était là elle ne pouvait décemment pas repartir. D’autant qu’elle venait pour la bonne cause. Il faisait d’abord toujours bon entretenir de cordiales relations avec une partie de son futur électoral, aussi déplorable fut-il. Quoique pour cela elle aurait pu s’abstenir de mettre les pieds ici, en face du numéro trois cent quatre-vingt-treize. Il suffisait d’user d’un peu de flatterie lorsqu’elle croisait Jean Farrow à la sortie de l’église ou d’une réunion associative – cette femme roucoulait de plaisir au moins petit compliment, c’était presque inquiétant – pour qu’elle aille ensuite prêcher la bonne parole auprès du petit monde qui croupissait non loin de sa famille. Faire recracher un laïus haineux à quelqu’un qui le buvait comme du petit lait, cela n’était pas bien difficile. La véritable raison qui l’emmenait à l’autre bout de la ville tenait à la capacité hors norme de cette famille à semer troubles et désordre partout où l’un de ses membres allait, ce qui par le passé s’était révélé plutôt utile. Et l’Art de la guerre, dont elle avait dernièrement fait une lecture attentive, stipulait bien que les opportunités stratégiques se créaient, les moyens dont on disposait dans la bataille étant logiquement proportionnels aux efforts qu’on déployait dans leur acquisition. A cela s’ajoutait le principe de la terre brûlée – Diane se permettait une interprétation quelque peu extensive des grands principes de Sun Zi –, selon lequel un moyen sûr vers la victoire consistait à encercler son ennemi de chaos. Alors il devenait tragiquement nécessaire de faire une halte à West Savannah – question d’intérêt général, évidemment.
Bien sûr Diane venait préparée, décidée à ne se déplacer pour rien.

Après une profonde inspiration, elle fit glisser les lunettes de soleil qu’elle avait sur le nez vers le haut de sa tête, attrapa le sac à main posé sur le siège passager, et d’un geste sec ouvrit la portière pour s’engouffrer dans une chaleur étouffante. Et il était probablement inutile de rêver d’un intérieur climatisé. A mesure qu’elle se rapprochait de la maison, traversant la rue d’un pas vif pour échapper au moins au soleil, un bruit confus devenait plus audible, sans que Diane ne puisse dire s’il s’agissait d’esclandres de gamins dans le jardin, d’une dispute qui avait éclaté, de la télé dont on aurait tourné le volume à fond, ou peut-être tout à la fois. Combien étaient-ils dans cette bicoque, encore ? Quatre, peut-être cinq ? Pendant qu’elle attendait derrière la porte à laquelle elle venait de sonner, ce qui n’avait pas manqué de tirer un meuglement mécontent qu’elle attribua à Jean, Diane tenta sans grand enthousiasme de dresser la liste de la descendance de celle-ci. Enfin peu importait, il n’y en avait de toute façon qu’un qui l’intéressait vraiment.
La porte s’ouvrit finalement, laissant échapper de la maison une bouffée moite et puante de tabac froid et apparaître dans l’encadrement une femme dont l’air peu avenant laissa la place à de grands yeux choqués quand elle réalisa qui venait la déranger au milieu de son téléfilm. Bien rodé à l’hypocrisie, pratique quotidienne obligeait, Diane força un large sourire alors que Jean se redressait en un sursaut et s’écartait légèrement pour la laisser entrer. « Jean, je suis désolée de venir sans prévenir, je sais que j’aurais dû appeler. Mais je viens d’aller voir mon frère sur le site d’un de ses projets, quelques blocs plus loin, et en repartant j’ai réalisé que c’était l’occasion de prendre enfin le temps de boire ce café. Je ne dérange pas, j’espère ? » Evidemment l’excuse était fausse, mais il fallait bien une raison pour passer à l’improviste. Car si elle avait appelé elle était à peu près certaine que Jean aurait fait fuir toute la famille à force de leur répéter de bien se tenir, ce qui aurait été très contre-productif. Restait à espérer que Sidney soit bel et bien là, sinon quoi elle aurait eu du mal à faire le deuil de tout ce temps perdu. Mais en débarquant un samedi en fin d’après-midi elle mettait beaucoup de chance de son côté. Comme dépassée par les événements, il fallut encore quelques secondes à Jean pour reprendre ses esprits et lui assurer que non, bien sûr que non elle ne dérangeait pas, au contraire – puis s’ensuivit maintes excuses sur l’état de la maison, dont elle avait justement prévu de faire le grand ménage le soir même, aussi il fallait l’excuser pour le bazar, mais en même temps, les enfants, c’était quelque chose, ça s’étalait partout, Diane devait bien le savoir, n’est-ce pas. Avant qu’elle ne s’asphyxie à force d’oublier de respirer, Diane posa une main aimable sur son avant-bras et lui assura qu’elle avait une maison tout à fait charmante. Tout en jetant un œil autour d’elle, traversant le salon pour se rendre dans la cuisine, elle sentit tout de même un léger frisson courir dans le creux de son dos alors que brutalement elle se rappela que la tuberculose n’était pas encore éradiquée et que ce genre d’endroit avait tout ce qu’il fallait pour en être un des derniers foyers.
Mettant de côté les conséquences sanitaires de cette visite – elle trancherait plus tard la question de brûler ou non ses vêtements au nom d’un principe de précaution –, Diane déploya toute la fausseté dont elle était capable pour sembler intéressée par les jacassements de Jean. Heureusement cette dernière n’avait besoin que de quelques relances pour continuer à faire seule la conversation, pendant que derrière sa tasse de mauvais café Diane songeait à la suite. Car elle se réjouissait d’avoir aperçu, affairé au fond du jardin, l’homme qu’elle était venu voir. Ne restait plus qu’à provoquer l’occasion d’aller lui dire un mot sans que cela ne semble trop suspect à la mère Farrow. Mais celle-ci ne tarda pas à faire dériver la conversation de la sortie de prison de son mari – injustement enfermé, c’était la rhétorique quasi officielle des anti-crawlers – à ses enfants, dont elle assurait qu’ils faisaient de leur mieux, à peu près, mais se faire sa place dans le monde était parfois difficile – encore la faute aux crawlers, si on lui demandait son avis. Bref, il n’était pas parfait, mais il fallait tout de même reconnaître que Sidney essayait, hier par exemple il était monté sur le toit pour ajuster l’antenne. Profitant de la courte inspiration que prit Jean, qui décidément était bien trop bavarde, Diane l’interrompit pour demander d’un air concerné : « Vous permettez que je vous laisse un instant pour aller lui parler ? Le père Lloyd cherche des bénévoles pour la rénovation du toit de l’église, peut-être que j’arriverai à convaincre Sidney d’aider. » Ah oui, ça c’était une bonne idée, assura aussitôt la Farrow, peut-être que si quelqu’un d’autre qu’elle essayait de lui faire mettre les pieds près d’une église cela marcherait – parce qu’elle faisait de son mieux, il fallait la croire, mais tout de même, les enfants ce n’était pas facile. Après que Jean lui ait assuré qu’en l’attendant elle lui ferait une copie de cette recette de brownie qui lui valait apparemment beaucoup de compliments, Diane abandonna donc son mug à la propreté douteuse sur le comptoir de la cuisine et sortit dans le lopin de terre qui servait de jardin, rejoignant l’établi autour duquel s’agitait Sidney.
Elle ignora le molosse qui se redressa légèrement en la voyant arriver, comme elle tentait de ne surtout pas attarder le regard sur chaque détail miséreux de ce décor, et s’arrêta à bonne distance de cet homme qu’elle n’avait pas vu depuis des années. Quand il réalisa qu’il avait de la compagnie, elle se fendit d’un sourire aimable. « Je me réjouis de voir que vous allez bien. » Bien, c’était peut-être un mot un peu fort. Il tenait debout, ce qui au vu de l’état de profond abattement qui rayonnait de sa personne relevait du miracle. Et puis il était ailleurs que derrière des barreaux, ce qui constituait déjà une grande avancée en soi. Bref, Diane exagérait quelque peu la réalité pour se montrer aimable, parce que c’était ce que les gens bien élevés faisaient quand ils entamaient une conversation, y compris quand celle-ci était strictement intéressée. Aussi elle ajouta au passage : « Il paraît que vous avez trouvé du travail. » Ce qui, quand on avait une vague idée de ses tendances chroniques à l’autodestruction, était moins étonnant que le fait qu’il l’ait pour le moment conservé. Mais si la prison l’avait peut-être fait évolué, Diane doutait qu’il en soit sorti radicalement changé. S’il y avait des choses intangibles, les Farrow et leur essence profondément navrante en faisaient assurément partie.
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MessageSujet: Re: Requiem for the American Dream (Sid)   Requiem for the American Dream (Sid) EmptyDim 13 Sep - 18:18

requiem for the american dream, dianey#1 - - - You hear it in every political speech, “vote for me, we’ll get the dream back.” They all reiterate it in similar words—you even hear it from people who are destroying the dream, whether they know it or not.

« Et ça sert à quoi ça ? » Assis en tailleur sur l’herbe cramée, son neveu fouillait sa boîte à outils et examinait attentivement ce qui lui tombait sous la main. « Une pince-étau, il répondit, en ponçant un morceau de bois, mais fais attention, y a des trucs dangereux.Comme quoi ?Tu veux pas aller rafraîchir Sadie ? » Le gamin se hissa sur ses guiboles pour se précipiter vers le tuyau d’arrosage, trop heureux qu’on lui accorde enfin la permission de jouer avec – chose rare, et probablement l’unique manière d’éviter qu’il perde un doigt en s’amusant avec une tenaille. À l’instar de son oncle, le môme avait lui aussi tombé le t-shirt, et il n’arrêtait pas de dire, je veux des tatouages comme toi. Parfois, il se gribouillait quelque chose sur le bras, à l’aide d’un sharpie, avant d’exhiber le résultat grossier sous le nez froncé de sa mère. Jesse approcha un jet d’eau malingre du pelage du molosse avant que la voix aiguë de Jean l’appelle au loin. Il entendit autre chose, sans être capable de prêter ne serait-ce qu’une seconde d’attention aux cris maternels, et peut-être aurait-il dû – parce qu’il eut l’air sacrément con, en reconnaissant une silhouette familière.
Sid appréciait qu’on lui foute la paix.
Et les visites impromptues réveillaient l’ire grondant sous ses traits figés – une grimace inquiétante à laquelle eut droit Diane Parker-Wright, alors qu’elle s’approchait de son atelier de fortune. Il avait finalement décidé de retaper leur cabanon pourri sur un coup de tête et s’était lancé dans les travaux sans réfléchir le moins du monde à un plan quelconque. Un besoin pathologique de s’occuper les mains – l’esprit – peu importent les circonstances, aussi s’était-il jeté à bras le corps dans des « rénovations » incongrues, comme s’il envisageait de voir un jour cette baraque de merde atterrir sur le marché de l’immobilier. Un matin, il s’amusait avec la toiture, le lendemain, il décidait de repeindre un mur, l’après-midi, il vérifiait la tuyauterie – pas qu’il veuille se rendre utile ou prouver que sa présence était nécessaire, c’était la seule façon pour lui de conserver un semblant de concentration sans être assailli par des nuisances extérieures (ou, autant le dire : la réalité). Sa mère passait parfois, tentait laborieusement de lui arracher un mot ou deux avant de rebrousser chemin, vexée de ce manque de considération. Il ne semblait pas surpris, l’aîné Farrow, mais interrompit toutefois son ouvrage, délaissant porte et perceuse à regret, pour gratifier Diane d’une œillade méfiante.
Il n’aimait pas les nantis.
Jalousie mal placée ou méfiance justifiée – ceux-là, ils ne vivaient pas sur la même planète, encore moins dans la même dimension, et pourtant, ils se mêlaient au vulgum pecus afin d’éveiller une vague sympathie, car chacun connaissait sa place : les pauvres trimaient, les riches régnaient. Ils n’étaient pas dupes, malgré leurs protestations faiblardes, et Sid avait appris à cracher sur leur gueule tout en leur servant une courbette maladroite. Les Parker-Wright, ils ne comptaient pas minutieusement leurs dollars et ne filtraient pas les appels alarmés du banquier – ils n’avaient sûrement pas conscience qu’une crise secouait le quotidien des besogneux, et c’était une raison de plus de les haïr gratuitement. À West Savannah, Diane était l’anomalie, avec son blond bien entretenu, ses fringues bien repassées, son port de tête bien droit – une prestance malvenue au pays des ploucs, et Dieu savait que l’ego de Jean ne tarderait pas à exploser. Elle était si fière de se croire proche de ces gens, hermétique au mépris nimbant leurs gestes et à la condescendance de leurs paroles doucereuses.
« Je me réjouis de voir que vous allez bien, » il jeta mollement les gants dans la boîte à outils et épongea d’un revers de main le film de sueur moite qui lui collait au front avant de réajuster sa casquette. L’ombre de la visière masquait la partie supérieure du visage rougi, et il eut envie de rétorquer que « bien » était une exagération. Mais Sid ne donnait ni dans la plaisanterie, ni dans le sourire penaud – au lieu de quoi, il échappa un glaviot, haussa une épaule sans se fendre d’une politesse quelconque. Il ramassa un t-shirt abandonné par terre, un bout de tissu kaki où apparaissait le logo des Marines, et qui, s’il lui restitua un semblant de pudeur, ne le rendit pas plus présentable. « Il paraît que vous avez trouvé du travail. » Contrairement à une idée reçue, il n’était pas né de la dernière pluie, quoiqu’on en dise, lorsque les rumeurs le peignaient volontiers comme un abruti fini incapable d’aligner deux mots sans bégayer. Un type ignorant, tout en muscles et neurones broyés. Il n’aurait jamais avoué que ce poncif le vexait – des années, qu’il gérait les factures et les emmerdes administratives de ses parents, et on le taxait d’imbécile notoire. Il pinça les lèvres avant de répliquer, dans un marmonnement presque inaudible, « c’est réglo. » Son regard clair se braqua un instant sur les traits altiers de son interlocutrice, qui avait sans nul doute compris le sous-entendu à peine dissimulé. « Faut pas que ça dérange, » il ajouta. Ils en savaient quelque chose. Ça ne lui posait pas problème, à une époque – de déranger. Surtout quand on le remerciait avec une liasse de billets assez épaisse pour le convaincre de revenir, à l’instar d’un clébard bien éduqué. Cinq ans à l’ombre lui avaient remis les idées en place (du moins, le pensait-il), et il commençait à subodorer la raison de cette visite imprévue. « Vous voulez quoi ? » Et rustre avec ça. Pas franchement ravi qu’on l'emmerde. Il ne comptait pas l’inviter à s’asseoir, ni à lui proposer une connerie de bourge (du thé glacé par exemple – que sa mère devait préparer en ce moment même afin de prouver qu’elle possédait un certain degré de raffinement, si celui-ci se rapprochait d’une bouteille d’Ice Tea vidée dans une carafe). Il sortit son paquet de clopes de sa poche et en vissa une entre ses lèvres. « En campagne ? » Une pique fraîche. Besoin de gros bras ? La sobriété – ou ce qu’il considérait être la sobriété, nonobstant les deux cannettes de bière vides posées sur une chaise pliante – l’avait distancié des discours auxquels il adhérait, autrefois. À une époque, peut-être se bouffissait-il d'orgueil qu’une femme comme Diane s’intéresse à ses « atouts », et d’autant plus à même d’aller accomplir sa basse besogne. Était-ce un temps réellement révolu, là était la question.
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MessageSujet: Re: Requiem for the American Dream (Sid)   Requiem for the American Dream (Sid) EmptySam 17 Oct - 20:46

Dans le cénacle de la grande bourgeoisie, on travaillait dur pour euphémiser et ignorer ceux qui ne faisaient pas partie de cet entre-soi. Les ayant-droit, ceux qui ne savaient pas ce que compter voulait vraiment dire, se gardaient bien d’aller constater d’eux-mêmes ce que la confrontation sociale voulait dire. Il était plus confortable de fermer les yeux depuis le confort de sa ville que de s’intéresser au quotidien des autres. Aussi la nécessité militante d’aller à la rencontre de l’extérieur de son monde aux frontières bien établies l’avait toujours quelque peu déstabilisée. Depuis quelques années Diane croisaient çà et là, strictement au besoin, quelques représentants des fractions lointaines de ses soutiens idéologiques, mais le déplaisir de ces moments ne décroissait pas avec le temps. Et loin de bousculer son esprit conservateur et de lui faire entrevoir l’idée que l’accumulation capitalistique dont elle était complice participait activement à ces inégalités criantes, ils renforçaient la certitude que les hiérarchies sociales étaient le reflet de dispositions individuelles qui, tragiquement pour eux, manquaient à certains – mais, tout de même, il était important de les aider au moins un peu, charité chrétienne obligeait. Là était l’une des grandes utilités des bonnes oeuvres : permettre à ceux qui y donnaient de dormir la conscience tranquille.

Dans tout le manque de compassion que lui inspiraient les Farrow, qui respiraient la complaisance pour leur propre condition, Diane trouvait tout de même que Sidney se détachait. En mieux ou en pire, ça elle ne l’avait pas encore déterminé avec exactitude. Il y avait en tout cas quelque chose de désolant à le voir se débattre maladroitement avec la vie quand on savait que quelques années plus tôt il avait eu le mérite de servir, même si sans doute peu utilement, son honorable pays. En bonne américaine elle méprisait le socialisme mais adhérait tout de même à l’idée, emprunte d’un certain nationalisme, selon laquelle l’Etat avait le devoir de venir en aide à celles et ceux qui avaient un jour été prêt à se sacrifier pour lui - or elle avait sous les yeux la preuve qu’il y avait encore du chemin à faire avant que les vétérans bénéficient des égards qui leurs étaient dus. Cruellement, la précarité de cet ancien soldat couplée à une absence manifeste de perspectives d’avenir l’avait par le passé arrangée. Mais, contrairement à ce qu’elle avait un jour craint, ce n’était pas leurs petits arrangements qui avaient précipité Sidney devant un juge ; pour ce qui était de plonger tête la première vers les problèmes il n’avait besoin d’aucune aide. Personne ne l’avait forcé à descendre verre après verre, ni à s’asseoir derrière le volant.
Quant à la capacité de la prison à transformer drastiquement un homme, Diane en doutait. Le vernis était peut-être neuf, mais derrière un travail légal et des après-midi passées à bricoler humblement le fond restait probablement le même. En tout cas, quelques années derrière les barreaux ne l’avaient pas rendu plus loquace. Toujours aussi taciturne, Sidney allait à l’essentiel, se contentant des faits les plus bruts. « C’est réglo. Faut pas que ça dérange. » Une bien belle résolution, un effort tout à fait louable et peut-être même sincère. Mais entre ce qu’il fallait et ce que Sidney ferait tôt ou tard il y avait un gouffre.  Elle ne doutait pas de son intention morale mais il était improbable qu’elle survive au quotidien. Il avait un jour goûté à de l’argent presque facile, savait que les interstices de la légalité on payait bien, et face à de basses considérations matérielles il finirait probablement par craquer. Sans doute pas aujourd’hui, peut-être dans quelques semaines seulement, mais il y aurait bien un jour où l’appât du gain, couplé à un fond inhérent de violence, aurait raison de ses bonnes résolutions. « Vous voulez quoi ? » Diane esquissa un haussement d’épaules. « En campagne ? » Avec un sourire aussi large que le visage de Sidney était renfrogné, elle répondit aussitôt : « Au contraire, en week-end. » Mais si elle le passait dans le jardin miteux des Farrow plutôt qu’à siroter une citronnade au bord de la piscine c’était bien que la campagne ne permettait pas de véritable répit.

« Si je vous dis que c’est une simple visite de courtoisie vous me croyez ? » Non, bien sûr, et elle ne lui ferait pas l’insulte d’essayer de le lui faire croire. D’autant qu’elle n’avait pas exactement l’envie de s’attarder trop longtemps face au spectacle désolant qu’il lui donnait, aussi elle s’abstiendrait de trop louvoyer - juste un peu, elle ne pourrait pas complètement s’empêcher de prendre quelques détours. D’autant plus qu’elle tenait à rappeler qu’elle ne prévoyait pas de se laisser impressionner par les airs taciturnes de Sidney - pour être poli, en réalité on pouvait plus sûrement les qualifier de franchement revêches. Il faudrait plus que quelques grimaces pour se débarrasser d’elle, qui forçait d’autant plus le trait d’une politesse lisse qu’on lui offrait des paroles laconiques et une attitude somme toute peu avenante. « J’avoue que bien qu’il est plaisant de prendre le café avec votre mère j’espérais surtout vous croiser. » Le terme plaisant était un évidemment un mensonge éhonté. Il n’y avait bien que Jean qui était assez aveugle pour croire que Diane appréciait réellement sa compagnie. Tout comme elle se doutait que Sidney ne serait pas berné par cette énormité, elle savait, au moment de le dire, qu’il ne croirait pas un mot des bons sentiments qui suivirent. « Bien sûr je tenais d’abord à vous souhaiter la re-bienvenue à l’air libre. Je ne peux qu’imaginer l’exaltation de retrouver sa liberté. » Très franchement, elle ne savait même pas exactement depuis quand il était sorti et s’en moquait assez. Peut-être depuis trop longtemps pour que ces paroles, déjà franchement vides, aient un peu de sens, mais cela n’importait pas.
Apparemment bien décidée à lui vriller les tympans d’une voix bien trop mielleuse pour être honnête, Diane commença à laisser entrevoir, de très loin, à ce qui l’emmenait ici. « Et tant qu’à faire j’espérais vous convaincre de profiter de tout le temps libre que vous laisse votre nouvel emploi pour aider activement la communauté. » Elle eut un regard pour le cabanon à moitié en ruine, que le matériel sorti semblait indiquer qu’il tentait de le rafistoler, esquissa au coin des lèvres un tic de perplexité, puis se fendit d’un nouveau sourire puant d’hypocrisie : « Même si je vois que vous vous occupez déjà utilement. » Laissant de côté ses projets douteux de rénovation, elle lui offrit sa plus belle incarnation de Mère Teresa, sancgriffé et mains manucurées en plus.« Mais je crois fermement qu’il n’y a rien de mieux que le don de sa personne pour s’endormir avec une véritable satisfaction de soi et une conscience tranquille. » Tout cela, elle y croyait fermement - tout comme elle était évidemment persuadée d’être un modèle en matière de générosité. Mais elle avait la quasi certitude qu’elle ne trouverait aucun écho chez Sidney et usait ici du registre de la charité comme simple digression. « Le pasteur est par exemple à la recherche de bras pour aider à la rénovation de la salle paroissiale, vous seriez d’une aide précieuse. » Ce cher pasteur, qui s’imaginait volontiers (et à juste titre selon Diane) sauveur des âmes en peine, aurait surtout vu dans Sidney un nouveau projet social qui l’aurait occupé un moment. Mais même le plus honorable des hommes de Dieu avait un pouvoir limité et ne pouvait pas ramener tout le monde dans le droit chemin. Alors pour gagner du temps, inutile que l’ainé Farrow s’embarrasse de tenter de trouver la grâce, autant qu’il retrouve  à la place rapidement ses premières amours : le chaos. Après ses quelques détours, Diane en vint donc enfin à l’objet de sa visite. « Et si le bénévolat ne vous attire pas j’aurais bien quelques idées pour… disons aider à l’accomplissement d’un projet moral tout en y trouvant votre compte. » Techniquement, participer à la concrétisation des idées anti-crawlers revenait à soutenir l’accomplissement d’une mission d’intérêt général, même si cela supposait d’utiliser des procédés moralement discutables. L’option était au fond bien moins pire que nombre de projets vers lesquels Sidney pourrait être tenté de se tourner.
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MessageSujet: Re: Requiem for the American Dream (Sid)   Requiem for the American Dream (Sid) Empty

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Requiem for the American Dream (Sid)
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