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 them lines. (money)

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Maura Pace
Maura Pace
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Allégeance : pas des plus loyales. officiellement virée de la meute hanover pour ses activités louches, elle a rejoint les morales, provisoirement (dit-elle)
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moonchild
MessageSujet: them lines. (money)    them lines. (money)  EmptyMar 19 Mai - 1:03



“Why can't we both be right?
Attacking, defending
Until there's nothing left worth winning”


« Because it’s a byod kinda thing, lance Simon en réponse à son haussement de sourcils, pendant qu’il hisse une glacière de la taille d’un petit iceberg, capacité 90L, dans le coffre de la Buick qui couine sous l’effort, avant de se frotter les mains d’un air satisfait. Il prononce ça comme un vrai mot, biode, et Maura ne peut empêcher un sourire goguenard d’étirer ses lèvres. – Byod ? (Elle est déjà trop vieille pour des acronymes à la con) – Bring your own drink. Christ, Maura, even my grandma knows this shit.Well bring her next time, and tell her to carry your cool box, because I won’t.Oh come oooon. » La supplication de Simon ressemble à celle d’un gamin de cinq ans, soit l’âge mental qu’elle lui donne sans l’avouer. C’est un loup originaire de Savannah, 100% couvé et biberonné à la virilité depuis sa naissance, il rattrape donc les caprices qu’il n’a pas pu faire dans une crise post-adolescente typiquement milléniale. Se donner des airs de gros bras est simplement la triste définition qu’il se fait de sa condition, mais il est encore trop jeune pour paraître crédible et verse facilement dans la sensibilité poetic lover quand il s’essaye au jeu kamikaze de la drague au Silver Tooth : I almost cried when I got that tattoo on my back, you know. Hurt like hell. La conversation avait dérivé du pathétique au potentiellement intéressant lorsqu’il avait mentionné les combats de lycans, allumant une ampoule quelque part dans le cerveau cotonneux de Maura. Sa participation prochaine lui donnait une excuse pour se faire mousser, même si ses joues de chérubin allait finir en purée et que personne, surtout pas la blondasse devant lui, ne comptait se coltiner le réconfort après l’effort. Il pensait avoir gagné une groupie ; elle avait juste attrapé au vol son ticket d’entrée pour le spectacle barbare auquel refusaient de participer les Hanover. « You look like you’re going to a picnic with this thing, not a fight club.We might want to celebrate afterward, I don’t know, you remember that me and the boys were thinking of fighting this time, right? (“Me and the boys”. Fucking kids. Vingt-cing ans à tout casser et prêts à se castagner pour – quoi ? – rigoler ? Ajouter du piment dans leurs vies de chiens ? Jouer avec des bagues de lune interdites ?) But… not sure they’ll want you to join, though.Oh yeah? Because I lack testosterone?Well… you know how it is.So you make me carry your drinks all the way there but tell me I probably won’t be able to join the secret society after all? (Elle referme le coffre d’un coup sec, étouffe un rire qui ressemble à un jappement). You’re a fucking joke, Simon. Get in the car, we’re gonna be late. »

Dans la station de métro abandonnée, sous les néons qui pendouillent du plafond en béton, la hargne est contagieuse. Simon tente de retrouver ses amis loupiots avec difficulté au milieu du plus grand mélange des meutes jamais vu et Maura le suit tant bien que mal, à peine visible parmi les armoires à glace, ressassant la dernière phrase qu’il lui a dit avant de pénétrer dans la tanière : tiens-toi à carreau. Autrement dit, une invitation à l’envoyer se faire foutre une fois la soirée terminée. Il s’attendait à quoi ? Qu’elle déboule au milieu de l’arène improvisée pour ramasser les mises ? Qu’elle grimpe sur les épaules du premier venu pour mieux les voir s’écharper ? Qu’elle offre une tournée générale grâce au jackpot qui sommeille dans son coffre ? La condescendance ne faisait pas partie du deal qu’elle avait signé. La meute lui avait offert la sécurité, en même temps que le revers de la médaille : l’ennui. Et cette putain de hiérarchie qui n’avait aucun sens. Tiens-toi à carreau. Well, bite me. Elle rumine son indignation en jouant des coudes, les yeux à la hauteur des nombrils, puis manque de se prendre un coude en plein nez lorsqu’une silhouette familière apparaît de l’autre côté du ring improvisé. Simon, exaspéré, est revenu sur ses pas et lui tend désormais la main comme si elle était une enfant qu’il aurait peur de perdre en pleine parade Disneyland. Elle l’ignore, désigne l’aîné Farrow du bout du doigt à la place. « What the… fuck’s he doing here?Who? Him? Dunno. Army fucker. My old man hates his guts, but says it’s the right place to beat the shit out of him.  – You have humans fighting as well?!Only the loonies. (Il avise ses grands yeux écarquillés, prend son trouble pour une conséquence directe de ses paroles, à tort, et se met à lui rire au nez) Why? Is that against your moral code or something? … M-Maura? Where are you going?! Hey, come back here! » Comme si l’ordre allait docilement la faire changer d’avis. Retour dans la foule pour se faufiler du bon côté, pendant qu’un malabar lance les prochains paris d’une voix tonitruante et que deux types sonnés pressent des morceaux de tissu ensanglantés sur leur visage – l’un sur son oreille, sorte de steak haché pas cuit, l’autre sur son œil bouffi. Maura traverse la foule comme une forcenée en sens inverse, pousse des coudes, des genoux et de tout son poids contre les malheureux en travers de son chemin, marche sur le pied d’un type qui ne sent absolument rien, est projetée contre le dos d’un autre qui la salue d’un air vaseux, utilisant un prénom qui résonne comme une gifle (Hey, Trish, long time no see!) avant d’arriver en nage à côté de Sid, vidée du cocktail panique-colère-sidération initial. Les deux mains sur les genoux, elle peine autant à retrouver sa respiration que le souvenir de leur dernière rencontre, dix ans, quinze ans plus tôt ? Plus ? Avant le courrier, les colis, et ce rottweiler stupide dressé à bouffer les jambes des facteurs. Elle se souvient encore de la gueule de six pieds de long de Quinn quand il avait appris où son frère était parti. Comment Trish, pendant leurs rares mais interminables coups de téléphones, lui racontait qu’elle menaçait les jumeaux en brandissant le parcours de Sid comme un destin tout tracé s’ils continuaient leurs conneries (et à force de le répéter, l’un d’eux avait commencé à y croire). Il revenait réclamer des bleus, volontairement, toujours pas rassasié ? Au milieu d’une race qu’il haïssait ? « You must be (à bout de souffle) fucking (syllabes hachées) kidding me. Sid ? Really ? You can’t find enough humans to fight you? I’m pretty sure some of them would pay to punch you, come on, don’t be stupid, go home. » L’ordre ne sert à rien, elle en est amèrement consciente, contaminée par l’agressivité qui se propage comme un virus aux quatre coins de la pièce. Avant qu’elle ne s’embourbe davantage, les doigts de Simon se referment sur son épaule. Elle les dégage d’un mouvement sec. « Simon, I don’t need a babysitter, go away.I would pay to punch him, actually.What? No, no, no, we’re not doing this.But I would.Can you shut up? He’s leaving. You’re leaving, Sid. What are you even doing here? This place is crowded with… Elle hésite une seconde de trop en croisant son regard, fronce les sourcils devant tant d’aberration. … werewolves, damn it. »
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Sidney Farrow
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flesh and bones
MessageSujet: Re: them lines. (money)    them lines. (money)  EmptyMar 2 Juin - 18:02

them lines, money#1 - - - twisted thoughts that spin 'round my head, I'm spinning, oh I'm spinning, how quick the sun can drop away

« Where are you going?Out. » Une assiette frappe brutalement les parois de l’évier. Tanya n’essaye pas de le retenir mais son soupir réprobateur vaut mille mots – de ceux qu’il n’a pas envie d’entendre, du reste. Son bras se faufile dans la manche d’une veste tandis que sa main s’empare du double des clés de la bicoque, abandonné sur le guéridon de l’entrée. Elle est gentille, Tanya. Vraiment. Attentionnée comme il faut, trop pour l’être exécrable sur lequel elle a jeté son dévolu. Elle a préparé la popote, s’est imaginé une soirée aux chandelles, peut-être cache-t-elle sous sa blouse noire de la lingerie plus chère que d’habitude. Les regards s’accrochent, et il avale les quelques mètres qui les séparent. « I’ll come by tomorrow. » Le pouce s’attarde sur la pommette mais elle s’éloigne aussitôt et part s’essuyer les mains sur un torchon froissé. Des promesses, il en égrenait chaque jour sans les honorer, et cette histoire, plus pathétique que paisible, ne calmait pas les tempêtes intérieures. Il ne trouvait aucun réconfort dans la petite maison douillette – la seule véritable victoire de son divorce avait été de conserver cette propriété qui ne payait pas de mine, dressée au milieu de tant d’autres dans un lotissement calme, à l’abri des dérives de son quartier. C’était propret. Une allée, une porte de garage, un bout de jardin, une terrasse improvisée à l’arrière, de la peinture fraîche, des meubles Target (leur strate sociale était parfaitement consciente que cette « touche vintage » n’était en réalité que le reflet de leurs comptes en banque à sec), et les travaux qu’il effectuait ici et là. Il n’appartient pas à ce monde, Sid. Rien dans l’allure ne suggère qu’il porte l’ennui suburbain en lui, et un soulagement pervers lui étreint le poitrail lorsqu’il bifurque en bout de rue, retrouvant au loin les horizons délabrés des coins oubliés de la ville.
Dans sa poche, le poing le démange. Il tire sur une clope et bat le bitume sans conviction. Il s’embarque dans les artères les plus délétères de West Savannah et aperçoit au loin les bagnoles rassemblées près des bouches de West End Station. Il a troqué une soirée soporifique avec sa copine pour la rage grondant dans un tunnel abandonné, et c’est là tout ce qu’il y a à savoir sur Sid. Le menton haut, la cigarette éteinte, il cédait à des pulsions que ni l’armée ni la taule (ni l’âge) n’avaient endiguées ; au contraire, une hargne pulsatile trémulait au creux du bide, et il comptait bien s’en délester.

Sid se battait pour deux raisons.
L’argent, parfois. Le plaisir malsain de remplir ses poches avec l’oseille des loup-galeux le galvanisait, et ce n’était jamais grand-chose, pas de quoi investir dans des vacances en Floride, mais quelques billets lui tombaient de temps en temps entre les mains. Les clébards l’empêchaient de toucher l’intégralité de la somme qui lui était due, et invoquaient d’iniques prétextes (sinon, montraient les crocs) afin de le foutre à la porte.
Et la violence, toujours. On le taxait de suicidaire haineux lorsqu’il s’approchait du ring, mais ce n’était pas tant la perspective de flanquer une raclée à un cabot qui l’enflammait – plutôt celle de se remémorer le goût de ses propres entrailles. L’idée stupide de vivre un peu plus fort que d’habitude, sous une pluie de coups gratuits, quitte à crever la gueule ouverte, au beau milieu d’une foule en liesse qui célébrerait l’accident avec un enthousiasme légitime. Ils étaient nombreux à vouloir retapisser les murs avec des éclats de cervelle atrophiée, nombreux à s’aligner si d’aventure le Farrow se pointait, des bandages sales enroulés autour de ses articulations, déterminé à en découdre avec le premier venu, et plus nombreux encore à espérer qu’il clamse enfin.
Quelques paires de gobilles l’éraflent dès son arrivée. On reconnaît la tronche, et les conversations se taisent ou se transforment en insultes méritées. Des menaces orageuses lui explosent à la figure. D’ordinaire, il se ramène flanqué de deux ou trois gaillards pas plus avancés intellectuellement, mais l’absence de protection ne l’effraie pas outre-mesure. À se demander si l’instinct de survie fonctionne toujours, ou s’il ne cherche pas davantage que des commotions. Des billets chiffonnés s’échouent sur la table d’un bookmaker, qui l’avise d’un regard vipérin. Pas besoin de s’annoncer, il prendra le premier adversaire qu’on lui jettera dans les pattes. Peu importent la taille, le poids, la carrure, du moment qu’il se retrouve dans l’arène. « Fucking asshole, » il entend.
Et il a l’audace de sourire, si la contorsion étrange de ses lippes s’y apparente.

Une voix familière le cloue sur place. Il attend sagement son tour, pas que les opposants potentiels manquent – c’est à celui qui misera le plus. « You must be fucking kidding me. Sid ? » Maura est essoufflée. Le sang lui mord les joues, et il amorce un mouvement de recul. Ce métro délabré était bien le dernier endroit où il s’attendait à la voir. Il enroule une bande de gaze autour de ses phalanges, avec la minutie d’un combattant aguerri, ce qu’il n’était pas – ses entraînements militaires l’avaient préparé à encaisser (ou était-ce les beignes de Callum ?), mais il n’avait pas la moindre technique, encore moins la discipline. « Really ? You can’t find enough humans to fight you? Faut croire qu’il s’est assagi face à ses semblables. Il ne traîne plus assez dans les bars pour causer des esclandres dignes de ce nom, et ses fesses n’avaient pas touché le banc d’une cellule de dégrisement depuis un moment déjà – l’effort n’en est pas un, il a moins de temps à perdre dans les verres de whiskey et un agent de probation à berner. – Fuck off, Maura.I’m pretty sure some of them would pay to punch you, come on, don’t be stupid, go home. » Son regard de désaxé se braque sur le visage poupon. Rentrer chez lui. Auprès de qui, sa mère ravagée ? La solitude lui cisaillait le poitrail, et c’est ici qu’il venait la tromper – les œillades malveillantes ricochent contre son dos, mais ont-ils seulement conscience qu’il a grandi sous un regard plus venimeux encore que le leur ? Pensent-ils sincèrement attiser sa peur, lorsqu’ils le menaçaient ouvertement ? Son impavidité n’a d’égal que son indifférence. « You’re leaving, Sid. What are you even doing here? This place is crowded with… werewolves, damn it. » Une grimace stupéfaite griffe le visage du mauvais acteur, et il prétend jeter des coups d’œil terrifiés autour de lui pour qu’aussitôt, une consistance froide réinvestisse ses traits. « Is that so? That’s some brand new fucking information. Shit, what should I do? » Ses billes croisent celles du mec qui tente de tirer Maura en arrière, et le « I would » qu’il échappe ne tombe pas dans l’oreille d’un sourd. « You’d pay, huh? I could shove your mangy mutt ass back to your mother’s womb. I ain’t scared of no moonbitch. » Une lueur grésille dans les orbes de la baby-sitter de circonstance, et l’appel du défi lui fait miser son pécule sur un combat qu’il s’imagine assuré de remporter.
L’armée met du plomb dans la tête et dans le corps. À chaque fois qu’il se dessape, une histoire entière se déploie sur un corps aussi entretenu que sec : les cicatrices éparses grignotant ses flancs, les tatouages courant sur la peau diaphane, de l’épaule droite à la hanche gauche, le drapeau américain entre les omoplates, l’acronyme USMC dévalant la colonne vertébrale. Les impacts de balles recousus dans un hôpital de fortune, la carne cramée, au niveau du genou, les traces d’un long séjour en taule, une estafilade blanchâtre sur l’avant-bras, vestige d’un accident en cuisine. Des brûlures de cigarettes, les siennes ou celles du pater. Tout est là, exposé sur un organe qui couvre laborieusement les os saillants, et nul besoin de parole face à ce spectacle désolant.
Le petit con s’avance, poings levés. Que de la gueule. Il a regardé Rocky deux fois et se dit qu’en sautillant d’un pied à l’autre, il se donne la carrure d’un boxeur professionnel. Sid mollarde son dédain à ses pieds, ouvre les hostilités avec un crochet. Les premiers échanges sont toujours sanglants. Les phalanges disent bonjour aux visages, dévient des pommettes, décollent la cornée – il sait à quoi s’attendre, n’en ressort jamais intact. Quinn avait dû l’accompagner aux urgences plus d’une fois, à l’époque où ces déferlements de violence gratuite constituaient la base de leur complicité effritée. L’arrière de son crâne heurte le sol. Ça lui fiche des étoiles dans les yeux. Les habitudes du pugilat se perdent, ou aurait-il dû enquiller quelques shots afin de nourrir l’illusion d’une force supérieure. Les huées s’unissent en une insupportable cacophonie cognant contre une oreille, et s’entremêlent au bourdonnement qui encombre la deuxième. Il échappe un glaviot de sang cradingue, et une molaire manque de se déloger de sa cavité. À quatre pattes sur ce ring urbain, un filet rougeâtre lui pend aux lèvres et, saisissant une occasion trop belle pour être vraie, l’adversaire lui enfonce un pied dans l’estomac qui le déséquilibre instantanément. Jubilation générale. Ça se traduit en cris sémillants, des « kill that motherfucker » lancés à tout-va. Une douleur innommable secoue sa charpente tout entière, et il est plus ou moins certain que plusieurs de ses côtes sont fêlées. Il expectore le peu d’oxygène que ses poumons ont récupéré, et se cambre afin de se hisser sur ses jambes éraflées, le souffle court. Pas de règles, ici. Pas de nanas en bikini portant à bout de bras des pancartes. Pas de corner où on lui enfoncera le goulot d’une bouteille d’eau dans la bouche. Le moindre signe de faiblesse est une invitation aux coups bas. Alors il se baisse, évite de justesse un poing serré, attaque le flanc, attaque le genou sur lequel pèse tout le poids de l’assaillant. De furieuses vociférations perdurent autour de lui, mais il l’a coincé comme un insecte prêt à être écrasé, défigure cette trogne de débutant jusqu’à ce que les râles cessent de cavaler dans la gorge.
Le goût métallique du sang lui imbibe la langue. Il ne voit plus très bien, n’entend plus très bien – ne ressent plus très bien. Lorsqu’il se redresse, il manque de tomber à la renverse à son tour. Ça siffle, ça vilipende. Ça finirait volontiers le travail. Il ne distingue plus Maura dans la foule, ramasse ses fripes, et clopine jusqu’à un bookmaker du dimanche, occupé à compter les dollars qui s’accumulent sous ses yeux. « Y’know what? One day you’re gonna die here, like the miserable son of a bitch that you are, and nobody’s gonna give a shit.Don’t get my hopes up, shit sniffer, » il rétorque, en arrachant presque la liasse maigrichonne de la paluche du cabot. Il se penche par-dessus la table d’appoint, « put me out of my fucking misery if you dare. » Provocation gratuite d’un intouchable se croyant au-dessus de la masse, uniquement parce que le meilleur pote portait un insigne à la ceinture et hantait les locaux du commissariat. Le type le toise sans renchérir. « All bark and no bite. »
À l’extérieur, ses membres perclus de douleur le rappellent à sa pitoyable condition d’humain. Il dégueule l’intégralité de son dernier repas, sous les œillades moqueuses d’un groupe de fumeurs, et s’éloigne en titubant, mais les quelques pas qu’il parvient à aligner sans trop d’encombres exigent des efforts incommensurables, tant et si bien qu’il finit par s’écrouler sur un banc abandonné. D’une main engourdie, il visse une clope entre ses lippes sanguinolentes, palpe le monstrueux hématome qui point sous son œil, et aspire une première bouffée douloureuse, l’occiput en arrière.
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Maura Pace
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moonchild
MessageSujet: Re: them lines. (money)    them lines. (money)  EmptyJeu 18 Juin - 12:25


Elle aurait préféré deviner sur son visage les symptômes d’un enivrement bien entamé, plutôt que ça. Cet air résigné, impassible, comme un type qui a sauté mille fois en parachute et pour qui le risque de s’écraser est devenu futile. Pas sûr qu’il soit venu sobre. Mais il en a l’air, et c’est encore pire. L’espace d’un instant, les premières retrouvailles avec Nickie viennent se superposer à l’ombre de Sid comme une mauvaise décalcomanie et elle retrouve la même défiance aux fonds des yeux clairs, le rictus de défense, la pointe d’écœurement qui lui crie de dégager, plus rien à faire là, plus dans ce quartier, et d’ailleurs pourquoi elle continue à venir traîner dans leurs pattes ? Nickie a fini par céder sous le poids des souvenirs, mais l’aîné sera une autre paire de manches. C’est stupide de vouloir le dissuader, et même de vouloir lui éviter un combat qu’elle juge, à tort, déloyal. Elle avait presque oublié l’obstination Farrow, trop absorbée par son job à plein temps de nounou chez des louveteaux malléables à souhait.
Ses mâchoires se serrent instinctivement alors qu’elle prend l’insulte en pleine face et tente de l’oublier sur le champ, mais les hurlements primitifs qui résonnent dans le tunnel n’aident pas à faire redescendre un calme imaginaire, à décrisper ses épaules. Son regard la traverse comme si elle n’existait pas. Elle s’apprête à tourner les talons, agacée au dernier degré, quand la promesse de Simon trouve preneur. « You’d pay, huh? I could shove your mangy mutt ass back to your mother’s womb. I ain’t scared of no moonbitch. »

Maura n’a pas décroché un mot, pas bronché, pas tiqué non plus quand Simon l’a repoussée derrière lui pour mieux saluer ses potes avec de grandes frappes viriles dans le dos. Leur coin de ce ring improvisé est envahi de jeunes louveteaux à l’excitation grandissante – du sang ! des poings ! de la sueur ! – et ils lorgnent de loin leur opposant, enfin prêts à participer au rituel morbide de leur clan. Elle voit la paupière d’un des loups tressauter involontairement à la vue des tatouages qui courent dans le dos de Sid. Un autre fronce les sourcils. Un troisième lui demande ce qu’elle fout là en mâchouillant un chewing-gum. Simon, lui, inconscient de sa propre bêtise, ne voit rien, trop occupé à balancer sa veste au visage de Maura, l’accompagnant dans la foulée de son tee-shirt puis du portefeuille qui traîne dans la poche arrière de son jean – lourd quand elle le soupèse dans sa main, léger comme une plume quand elle verse tout sur la table de camping du bookie, liasse de billets, pièces, cents, tout y passe. Même la pochette en cuir finit sa course au sol, bientôt piétinée par trois idiots qui se pressent dans son dos pour placer leurs paris. Son permis, ses papiers, son argent, fuck it. Elle est même tentée de partir sur le champ, comptant abandonner les gains dans tous les cas, mais son écœurement est vicieux et lui fait se rapprocher des abords du ring, malgré les vociférations dans ses oreilles et le sang qui cogne dangereusement à ses tempes.

Elle hait chaque seconde.
Pas pour le combat en lui-même, mais pour avoir provoqué la rencontre de ces deux imbéciles et pour être, de fait, à la fois coupable et témoin impuissant de ce… carnage dont elle est aux premières loges. Ses poings la démangent tandis que les encouragements en faveur du loupiot lui détruisent les tympans et elle se prend à espérer qu’ils s’amocheront bien assez pour que son exaspération des loups garous et sa déception des humains soient rincées l’une de l’autre. Et alors que la victoire est arrachée de justesse à l’intrus, malgré les protestations, Maura réalise trop tard qu’elle fixe encore les gouttelettes de sang au centre du cirque et qu’un tremblement nerveux s’est emparé de ses jambes. Il lui faut bien deux minutes entières pour sortir les ongles enfoncés dans ses paumes, encore plusieurs secondes pour retrouver un semblant de stabilité dans ses guiboles, et ce n’est que lorsqu’elle entend les prochains paris qu’elle se force enfin à trouver la sortie, indifférente aux œillades de Simon qui ne doit d’ailleurs plus voir grand-chose, bataillant pour remettre son tee-shirt malgré son visage boursouflé. Il pourra toujours crever pour qu’elle le ramène chez lui, ou chez ses potes, ou bien où que la défaite soit tristement célébrée à coup de tord-boyaux.
Dehors, le soleil est déjà en train de se fondre derrière l’horizon, éclairant le seul instant de la journée où le quartier paraît moins miséreux qu’il ne l’est véritablement. Un lampadaire clignote sans enthousiasme ; les autres conservent jalousement leurs ampoules grillées. Maura vole une clope au plus âgé du groupe qui s’est déjà formé près de la sortie, se rapproche de la flamme d’un briquet qu’on allume devant son nez, puis les sourcils se froncent quand elle fait quelques pas en direction de la silhouette prostrée sur le banc le plus proche. « If I were you, honey, I’d stay away from that bastard.I know. » Sous couvert de bienveillance, encore un faux conseil infantilisant. Elle est trop secouée pour l’envoyer sur les roses, trop reconnaissante de la taffe salvatrice pour s’enflammer inutilement. Le plus sage est de laisser couler. De passer devant Sid sans s’arrêter. De rejoindre la Buick. Elle hésite quelques secondes en déverrouillant les portes – et si elle se barrait, plantait Simon, laissait l’autre là à crever sur son banc ? – mais finit par ouvrir une portière pour dégoter un t-shirt qui traîne depuis trop longtemps, à la provenance et propreté largement discutables, puis fait glisser le couvercle de la glacière en train de suer dans le coffre et attrape quelques glaçons. La cigarette quasi consumée dans une main, le bout de tissu glacé dans l’autre, Maura revient sur ses pas, s’affale à l’autre bout du banc et dépose le baluchon sur les genoux de Sid – d’abord en silence, puis une fois la clope écrasée à ses pieds, en gardant les yeux rivés sur la barrière de bois écaillée qui les nargue de l’autre côté de la route : « I wouldn’t have bet a penny on you out there. » Reckless, and stupid. Elle voudrait presque profiter du fait qu’il soit plus bas que terre pour enfoncer le clou mais le maudire est au-dessus de ses forces, tout comme abandonner la partie. Un coup d’œil vers le groupe stagnant à la sortie de secours et leurs regards suspicieux lui rappelle de toute façon qu’elle marche sur des œufs – qu’à la minute où elle s’est assise, le mot ‘traître’ a commencé à clignoter dans toutes les têtes. Elle n’est plus à quelques injures près. « But… that dumbass needed a good punch. » Le semblant de sourire qui s’est dessiné sur ses lèvres s’évanouit aussitôt que la porte en métal s’ouvre à nouveau en grinçant, découvrant le-dit crétin et ses ecchymoses autour des yeux rappelant étrangement un raton laveur.

Simon se traîne jusqu’au banc en clopinant, fronçant les sourcils à la vue du duo improbable. Il allume une cigarette avec une morgue en carton, s’arrête à trois bons mètres d’eux comme s’il craignait tout à coup de se faire mordre. « I can’t find my wallet.Well, that sucks.I gave it to you before the... » Il hésite à prononcer le mot fight devant Sidney, clairement, bêtement, sa précieuse virilité peinant à se relever de l’échec, et Maura en profite pour le couper dans son élan. « You mean you threw it in my face?I gave it to you before the fight, for fuck’s sake.I may have placed a bet, you’re right, I remember now. » Un ange passe et Maura jette un coup d’œil à Sid, comme on vérifierait qu’un enfant turbulent n’a pas glissé de la balançoire (ou qu’un chien n’a pas pissé dans le parterre de fleurs ?). Une rumeur sourde se fait entendre, un écho sur les parois caverneuses du souterrain. C’est peut-être Simon qui hurle intérieurement, allez savoir, car à en juger par ses poings serrés le gamin paraît légèrement irrité. « I swear, we’re not done here. » Il tourne les talons et s’éloigne en claudiquant, la patte traînant derrière lui son humiliation. S’il ne se savait pas en infériorité il lui aurait probablement répété, lui aussi, de s’éloigner de la vermine sanguinolente assise à côté d’elle. Ou bien il l’aurait traînée à l’intérieur sans aucune considération. Maura ne peut empêcher un murmure de conclusion que l’intéressé n’entend pas – « Fucktard » – avant d’examiner avec un peu plus d’attention le pantalon tâché, la main aux jointures noircies qui repose dessus, évitant par la même occasion de regarder dix générations de haine pour les Enfants de Crawley dans les yeux. « How long have you been back? » De prison ? De l’armée ? Aucune importance, elle essaye juste d’aviser l’étendue des dégâts avant de le laisser repartir jusqu’au taudis qu’est le numéro 393. La raison pour laquelle ils vivent encore tous sous ce toit croulant, ou du moins, reçoivent tous leur courrier à cette adresse, est un mystère qu’elle ne saisit toujours pas et pourtant… c’était presque un soulagement de les savoir tous au même endroit, à son retour six mois en arrière. Une adresse, une épingle Google sur la source des emmerdes, jackpot de sa vie. « And you’re planning to spend the night on that bench, or…? » Elle se retient de lui balancer qu’il est incapable de conduire puisque, comme tous les Farrow à qui on suggère une inaptitude, il se fera sûrement un malin plaisir de lui prouver le contraire. Mais elle s’est levée, et le son de cloche que produisent ses clés de voiture fait office de proposition. Leave no man behind.

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MessageSujet: Re: them lines. (money)    them lines. (money)  EmptySam 4 Juil - 2:47

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Sid est un con qui n’apprend pas, et comme un con qui n’apprend pas, il s’entête à se fourrer dans des situations comme celle-ci : traîner à West End avec une cible sur le dos, encourant un risque tout à fait stupide, quoiqu’assumé, de se faire lyncher en place publique. Un jour ou l’autre, quelqu’un bravera les lois tacites qui se sont ancrées dans ces basfonds délétères et il n’y aura plus que ses dents à jeter au fond d’une urne. Il examine sa main droite et grimace, découvrant sans surprise une fracture douloureuse. Le poignet tourne doucement, à mesure qu’il constate l’ampleur des dégâts : plusieurs phalanges y sont restées. Il mésestime les particularités de ses adversaires lorsqu’il s’élance sur le ring, oubliant pendant un instant que ces types si semblables à sa stature ont une ossature largement plus développée que la sienne, et peu importe sa manière de triompher, pour les quelques fois où il en couche un au tapis, les dommages éclipsent la satisfaction d’une victoire arrachée de peu. Sa mâchoire se contracte, et la main gonflée retombe mollement sur sa cuisse. Il s’en occupera plus tard, encaissera une dette de plus en découvrant le prix pharamineux d’un plâtre, avec la maigre consolation que sa couverture sociale quasi inexistante remboursera un infime pourcentage de la facture. On lui reprochera les mêmes conneries, vous devriez faire une radio pour votre genou, et cette épaule, ça fait combien de temps qu’elle est comme ça, et il ne soufflera mot, conscient que les opérations dont il avait besoin lui coûterait plus d’un rein. La bouche sèche, il échappe un mollard sur le côté et avise un groupe de fumeurs, posté près des bouches d’entrée, distinguant la silhouette de la naine. Un contraste saisissant au milieu des gros bras, sans doute en train de lui conseiller de ne pas s’approcher – sauf qu’il y a une histoire, il y en a toujours une. Parle-t-elle toujours à Quinn, à Nickie ? Il se rappelle avoir croisé Trish à une caisse, quelques semaines auparavant, de dos seulement.
Maura n’a pas tellement changé, mais sa perception est peut-être altérée par l’image d’une petite gamine blonde trottinant derrière son frère, et c’est le souvenir qu’il conserve d’elle. Une lilliputienne qui squattait chez eux à la première occasion venue – rien de surprenant, avec la mère dont elle avait écopé. Au lycée, ses potes lui demandaient les tarifs de Trish, t’habites en face, t’as jamais voulu essayer, elle est encore bonne. Les bras lui en étaient tombés quand Callum avait lâché, au détour d’une conversation, que « turns out, that Pace girl is a fucking curdog » : il se souvient avoir croisé le regard éteint de Quinn, déjà peu disposé à l’accueillir pour sa brève semaine de permission, et entendu le ricanement mauvais de leur père, sans que personne ne cherche à continuer la conversation. Les préjugés ont la dent dure. Un bon loup est un chien écrasé, que leur répétaient les anciens, des abominations, et ils ont le culot de réclamer des droits – Sid avait appris à jeter des pierres sur les créatures avant même d’utiliser un fusil. À cinq, six ans seulement, il avait assisté aux premiers déchaînements de violence du patriarche Farrow, qui avait violemment rossé un jeune couple de lycans sous ses yeux, devant une station-service. Le bien et le mal sont des notions surfaites. Blondie a rappliqué avec une poignée de glaçons, visiblement peu encline à se préoccuper des œillades assassines qui se plantent dans son dos. Il dépose prudemment l’ersatz de compresse sur ses phalanges endolories, sans la remercier (soupçonne une pitié malvenue) – ni l’envoyer paître, un exploit compte-tenu de son humeur massacrante. « I wouldn’t have bet a penny on you out there. But… that dumbass needed a good punch. » Le coin de ses lèvres frémit. Rictus railleur, à peine perceptible. L’orgueil du combattant triomphant n’est toutefois pas à l’ordre du jour, et le retour de l’adversaire salement amoché tombe comme un cheveu sur la soupe, ou est-ce l’échange, frôlant le ridicule, qui le tire des vapes. La frustration du gamin est palpable – l’arrière-goût de sa défaite (mi-)cuisante ne disparaîtra pas de sitôt, maintenant que Maura a choisi son camp. Et quel camp. Il l’admonesterait presque, d’être aussi inconsciente. La virerait, s’il trouvait la force de verbaliser les fragments de protestations roulant dans sa gorge, tire-toi de là, je déconne pas, rends-lui le portefeuille, merde Maura, tu fais chier – au lieu de quoi, il se mure dans le silence, renonce à allumer une deuxième cigarette. Son paquet est dans la poche arrière de son froc, écrasé sous son séant. « How long have you been back? » D’où ? « Does it matter? » Il réplique alors, triturant machinalement le filtre du mégot afin d’en détacher la cendre. Probablement que non. De retour au bercail, comme toi, l’histoire s’arrête ici, sur ce banc de merde. Rien n’a changé, ne changera jamais. « And you’re planning to spend the night on that bench, or…? » Il discerne une invitation voilée. « Dunno yet, » chez Sid, une telle réponse se rapprochait d’une pointe de sarcasme, mais son timbre monocorde ne prête pas à rire. Le corps en vrac, il se hisse lourdement sur ses guiboles sans rien laisser paraître d’un vertige fugace mais c’est un pas incertain qui le mène à la Buick. Il s’écrase sur le siège passager et retire de sous ses fesses un dépliant qu’il jette sur le tableau sur le tableau de bord. Les glaçons ont fondu, ne reste plus que le tissu humide du t-shirt maladroitement roulé autour de sa main gonflée. (L’habitacle sent la clope et le chien mouillé.) Le soleil déclinant teinte le paysage de tons orangés, presque agréables, et lorsque ses orbes tombent sur le rétroviseur extérieur, il surprend les boursouflures de son reflet tronqué. Se détourne aussitôt de la contemplation. Pas qu’on attende de lui une justification quelconque.

Une fois le moteur en branle, il se détend, bien que cette proximité étouffante le trouble plus que de raison. Dans son champ périphérique, il devine le profil mutin de Maura, trop rapprochée du volant, et devant lui s’étale un labyrinthe urbain qu’il ne reconnaît plus. En cinq ans, la ville qu’il avait sillonnée des années durant avait changé – rien de drastique, pas de quoi s’y perdre, mais ces quelques altérations avaient bouleversé la familiarité du décor et de ses souvenirs avec. Il remerciera Maura une fois sorti de son tas de ferraille. Sa main, fermement accrochée à la portière, témoigne de son agitation nerveuse. « Where did you get your fucking driving license? » Ça se permet des remarques quand son propre permis lui a été retiré (certes, à raison – mais il ne comptait pas repenser à la plus longue journée de son existence dans la bagnole pourrie de Maura). Une série de klaxons tonitruants retentit derrière eux, et il glisse une œillade plissée (sa paupière a aussi doublé de volume) vers le rétroviseur, sans être en mesure de reconnaître le véhicule qui les talonne de près. « The fuck they want? » Pas de feux, pas de panneaux, Blondie respecte les vitesses, pas de grand-mère sur le capot, ni de cabot sauvage fauché au milieu de la route, aussi commence-t-il à perdre patience lorsque les signaux sonores se rapprochent, comme si un connard ivre mort se branlait en rythme avec son volant. « You should pull over, » il marmonne distraitement, en espérant qu’ils se contentent de les dépasser. Les pneus de la Buick frottent le rebord d’un trottoir et à son grand désarroi, la caisse voisine les imite. « Fuck me. » Il se débarrasse de la ceinture afin de se retourner, distinguant quatre silhouettes à l’arrière, et foutre Dieu, qu’est-ce qu’il a fait pour mériter de passer une telle soirée de merde – « Maura ! » La voix de discount Rambo. Sa gueule ne tarde pas à suivre, penchée du côté de la conductrice, « I need my cooler back. » Et il a manifestement besoin d’être escorté d’une garde rapprochée. « A fucking cooler? » Cette fois-ci, Sid s’adresse à Maura, entre ses dents, prêt à dégoupiller. Tu te fous de ma gueule, qu’il a l’air de siffler. Le petit con du combat le vrille d’une paire de gobilles sombres, et il louche dans sa direction, à l’instar de deux clébards hésitant à se renifler le cul. À deux doigts de dévoiler les babines frémissantes, car il n’a d’humain que la condition, une fois placé face à une adversité quelconque. Des réflexes de bestiau bourru. Il n’a pas besoin que ses humeurs soient régies par les cycles lunaires, la violence ne le quitte jamais véritablement, et sa main, greffée à la poignée de la portière, tressaute. « Do you have a gun? » La réponse à tout, n’est-ce pas, Farrow. File-moi ton arme et je te dirai qui tu es. Avec une main en moins, un œil à moitié fermé et des étoiles dans la tête, pas sûr qu’il vise juste, quoiqu’en dise son statut d’ancien sniper. « Get out of the car, » et histoire de les obliger à obtempérer, quelqu’un tire de l’extérieur. « Wasn’t gonna let a piece of shit like you get away that easy. » Un mauvais perdant par-dessus le marché. « Why don’t you go chew on a bone, » il raille tout à trac.
Aurait dû tenir sa langue.
Un premier coup dans l’estomac lui coupe le souffle, et son râble s’écrase mollement contre la carrosserie. Il devrait avoir l’habitude des altercations depuis son retour – surtout après les exploits de son père – mais il n’est pas mieux préparé. Incapable de se défendre correctement du reste, pas avec son meilleur crochet esquinté. Il ne parvient pas à esquiver un deuxième poing, s’effondre sur le macadam en suffoquant péniblement, la charpente tout entière parcourue d’une douleur si lancinante qu’il en oublie ses anciennes blessures. Un pied lui dévie une côte, et un autre parachève sa fracture. Un beuglement lui échappe – et ça se marre autour, c’est drôle qu’il rampe comme une merde, on a trouvé le point faible, mais pourquoi se contenter de lui péter les cinq doigts de la main quand le corps gît ainsi sur le sol, offert aux sévices, pissant autant de sang que de salive et de morve. Et pendant tout le temps que dure ce déferlement (justifié) de brutalité, il répète un manège appris enfant, disparaît en lui-même afin de braver la douleur, et peut-être finit-il par perdre connaissance, sombrer une seconde, ou a-t-il réussi à rouler sur le flanc, à se recroqueviller. Maura, si elle existe encore, a disparu de son champ de vision. La vue troublée par un voile grisâtre, ou le sang qui a giclé de son arcade sourcilière, les tempes sifflantes, il s’étouffe avec ses propres fluides.
Putain – il aurait dû s’en douter.
Ce n’est que partie remise.
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Maura Pace
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MessageSujet: Re: them lines. (money)    them lines. (money)  EmptySam 1 Aoû - 22:11



Elle pourrait presque conduire les yeux fermés dans ces rues. Presque. Parce qu’elle les a sillonnées en long en large et en travers, à toutes les heures possibles et par tous les moyens de locomotion imaginables (à pieds, à rollers, ceux qu’ils avaient volé dans le centre après avoir fait sonner l’alarme de la boutique tandis qu’ils couraient comme des dératés ; à vélo, en voiture, via un caddie de supermarché), les détails se sont imprimés dans sa mémoire à l’encre indélébile malgré la dizaine d’année passée à vouloir enfouir les souvenirs. West Savannah a gardé la même familiarité – dérangeante. Les altérations du quartier sont désormais dictées par une voix de robot et la répétition des mêmes trajets, toutes les semaines, parfois plusieurs fois par semaine si personne ne veut s’y coller, permet aux nouveautés de graver leur piste quelque part dans le cerveau, entre d’autres données inutilement stockées, les dates d’anniversaire, les habitudes des voisins passés et présents, les emplacements des boîtes aux lettres aussi aléatoires que farfelus. (Il revient parfois simplement à l’imagination de décider si elles ont plutôt été arrachées au cours de la dernière pleine lune, défoncées par une rixe sans intérêt entre deux meutes rivales, ou simplement volées par des gamins qui n’ont que ça à faire de leurs journées.) Certaines adresses ont leur propre légende urbaine et alors que Maura jette un œil plus nerveux que nécessaire dans le rétroviseur central, celle de Callum ramenant Mark à sa camionnette de l’USPS avec le canon de sa carabine planté entre les deux yeux lui revient subitement en mémoire. Le pauvre type avait voulu bien faire, contourner la baraque et vérifier qu’il n’y avait vraiment personne avant de ramener son colis d’un mètre par deux au central – la radio qui braillait dans le jardin l’avait poussé à enjamber une clôture – et ça ne plaisantait pas avec le concept de propriété privée, ici. Mark supervisait désormais toutes les livraisons du Victorian District, un jeu d’enfants puisque tout le monde dormait dès le lever du soleil.
Elle s’apprête à partager l’anecdote, portée par sa bonne action et par l’assurance que lui procure ce trajet familier, contrairement au tas de nerfs et de bougonnerie assis à sa droite qui se plaint déjà de sa conduite, qu’elle tente d’ignorer en le traitant comme un passager de taxi pris à cinq heures du matin à contre cœur – remember, you can also choose to walk. I’m just helping your night not to get any worse. doesn’t mean you can puke everywhere or insult the driver – mais ils ne sont pas en route depuis trois minutes que les embrouilles leur collent déjà au cul. Les klaxons la font sursauter. Un coup d’œil dans le rétro lui fait reconnaître d’emblée les silhouettes des quatre gamins entassés dans leur 4x4. La liberté est ténue dans ce quartier. Trois pas du mauvais côté de la cloison et le piège à mouches se referme.
« The fuck they want?How should I know ? » Elle a une graine d’idée, certes, mais le réflexe premier est de l’ignorer et d’enterrer sa potentielle responsabilité. Voire même d’accélérer un peu. Si elle s’arrête et qu’ils voient la gueule de son passager… et si elle ne s’arrête pas et qu’ils les suivent jusqu’au 393… Dans tous les cas, Simon se fera un plaisir d’ébruiter l’affront qu’elle semble la seule à vouloir délibérément ignorer. « You should pull over. » Sa capitulation est marquée par l’enclenchement du clignotant. Aussitôt la Buick immobilisée, elle reconnaît la démarche boiteuse de Simon qui s’approche de sa vitre baissée, distingue les trois autres loups qui entourent la voiture et donnent à cette démonstration d’intimidation des airs ridicules de Street of Rage (derniers niveaux du jeu vidéo, quand les méchants roulent des mécaniques sur fond d’apocalypse) et ça n’a beau être qu’une glacière, qu’un combat initialement sans inimitié, son cœur se met à battre furieusement tandis que Simon gueule son prénom. Qu’ils prennent leurs putains de bouteilles, qu’ils se servent dans le coffre, et qu’ensuite ils foutent le camp. Pourquoi est-ce qu’elle n’arrive pas à renifler la haine qui se distille subitement sous ses narines quand il se penche à la vitre avant et réclame sa glacière ? Et que Sid ne peut s’empêcher de l’ouvrir, bien évidemment ? « A fucking cooler? » Elle ignore le regard cuisant qu’elle devine dans sa nuque, préférant agiter un drapeau blanc imaginaire. « Let me open the trunk, come on, you’re blocking the…Do you have a gun?Simon you’re blocking my door, let me out.Get out of the car. » Il ne s’adresse pas à elle. En fait, il ne la regarde même plus depuis de longues secondes, trop occupé à imaginer un combat victorieux dans sa tête, celui où lui et ses petits merdeux de potes mettront la branlée du siècle à l’intrus de West End. « Simon…Wasn’t gonna let a piece of shit like you get away that easy.Why don’t you go chew on a bone.For fuck’s sake?! » De l’autre côté de la Buick, Sid est aspiré à l’extérieur, contre le bitume, contre les basquets des morveux qui n’ont pas eu l’honneur (discutable) de l’affronter dans l’arène et Maura se retrouve soudain étouffée par sa ceinture, toutes griffes dehors, bloquée par le seul bras de Simon qui regarde la scène d’un air détaché, une satisfaction doucereuse à la Severus Snape scotchée aux commissures des lèvres. You piece of shit, you fucker, you- let me go- stop it, stop it! the fuck, let me GO you – you – you – Simon, what the hell?! Les coups pleuvent à deux mètres de là et les cerbères de Simon ne sont pas agacés le moins du monde de venger leur pote sans que lui-même ne daigne participer au passage à tabac. Quand, enfin, elle réussit à planter ses dents dans la peau translucide autour du poignet qui lui maintient l’épaule, Simon lâche prise. « You know what his father did, right?So what?! » qu’elle hurle en s’arrachant à sa ceinture, repoussant la portière avec ses pieds et une force boostée par l’adrénaline. « You think you’re Robin Hood? The savior of West Savannah? (Elle fait le tour de la voiture en trois enjambées et sa hargne triple en voyant Sid recroquevillé sur le trottoir – une agressivité qu’elle avait presque oubliée depuis son retour en ville, cette soi-disant terre promise d’égalité, frétille jusqu’au bout de ses doigts.) You pathetic little shit. Just take your cooler, your bodyguards and fuck off.You’re completely clueless, aren't you? Well enjoy your night with the scumbag, Maura. » Alors que la glacière change de coffre, portée par deux paires de biceps, Simon se contente de secouer la tête d’un air dégoûté, cachant mal sa fierté ravalée d’avoir voulu impressionner (?) une louve qui n’a décidément rien compris à la vie ni aux castes qui rejouent depuis la nuit des temps les mêmes rivalités dans ce quartier pourri – et de tous les pourris, il faut qu’elle se range du côté des pires. Elle n’a même pas envie d’y penser. Ça fait une éternité que les Farrow ne sont plus là pour la protéger, qu’elle redoute presque de les croiser dans l’allée d’un supermarché et de devoir se laisser ignorer pour le bien de tous (mais certainement pas du sien) et pourtant. Certains réflexes ne s’effacent jamais vraiment. Notamment celui de vouloir secourir les cas désespérés.

« Hold on, hold on. Can you get inside the car ? Can you – oh shit. » Les yeux de Sid se sont révulsés, deux secondes à peine, donnant à Maura l’idée stupide de lui frapper les joues d’un geste peut-être plus fort que nécessaire. Elle répète son nom et les claques jusqu’à ce qu’il paraisse reprendre vaguement ses esprits, est à deux doigts de tourner de l’œil à la vue de son arcade sourcilière éclatée et du sang à moitié séché qui lui tâche les mains, puis les remords commencent à affluer par vagues et à s’accrocher à sa gorge. Rien ne sort, tout reste paralysé à la vue de ce carnage dont elle se reconnaît maintenant, en partie, ou juste à peine, responsable. « I’m – I’m… » Ses excuses se noient.
Elle attrape son téléphone d’une main tremblotante, fait défiler tout le répertoire pour trouver la lettre nécessaire – ça sonne indéfiniment dans le vide, tout le temps que Quinn met à ne pas décrocher sont des secondes précieuses qui lui paraissent durer une éternité – étouffe un juron, ne laisse pas de message vocal, décide par dépit de se démerder toute seule. « Why do I fucking bother, huh? » Elle le hisse sur son épaule après trois essais, et beaucoup de jurons gratuits – Come on, help me a little – fucking hell – shit, sorry, was that your hand ? It doesn’t look good. – le pousse sur le siège passager de l’autre main et la victoire est proche, il n’y a plus que les jambes qui dépassent de l’habitacle, lorsque la lumière dans la rue se fait plus vive et qu’un désagréable flash stroboscopique rouge et bleu leur défonce les rétines. Alors qu’elle relève les yeux, son regard croise un œil perçant qui se recroqueville derrière son rideau. Une déglutition amère fait retomber la bile. No one can mind their own fucking business in this town.
Quand le duo en uniforme s’approche d’eux, elle ne sait plus si son regard larmoyant est feint ou sincère. Le plus jeune, elle le connaît – Tony, un loup de la BCC, autrement dit un pariah – l’autre, plus sur une trentaine bien tassée, paraît sur le point de s’étouffer en découvrant la gueule de Sid à travers la vitre ouverte. Les deux officiers échangent un bref regard ; Maura tente de jouer la carte de la nonchalance, appuyée d’une main sur le capot de la voiture comme si la situation était tout à fait en son contrôle et qu’elle n’avait pas envie de hurler, chialer, s’enfuir en courant, you name it. Quand la pression sera retombée, elle aura une faim d’ogre, c’est tout ce dont elle est certaine. C’est le plus jeune qui l’ouvre en premier, comme si le quartier des loups était son territoire. « Someone called us, said some youngsters were using their sidewalks as a boxing ring. No offense, but you’re not exactly youngsters. So what the hell’s going on here?We were just leaving, nothing happened.His face doesn’t look like nothing.I’m just going home, that’s all.And what did you do this time? » Penché du côté de la vitre passager, le plus âgé s’adresse directement à Sid. D’un ton familier qu’elle n’arrive pas à replacer.

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MessageSujet: Re: them lines. (money)    them lines. (money)  EmptyLun 14 Sep - 14:45

them lines, money#1 - - - twisted thoughts that spin 'round my head, I'm spinning, oh I'm spinning, how quick the sun can drop away

Il a pris pas mal de coups, au cours de sa vie. Le constat pourrait arracher une larmichette au premier venu ou inspirer une indifférence méritée ; peu importe, on ne choisit pas dans quel foyer de merde on tombera. Peut-être que maman lâchera de sales remarques sur le physique de sa progéniture, peut-être que papa filera des tunes sans rien demander en retour, peut-être qu’on a hâte de rentrer au bercail pour les fêtes, peut-être que, comme lui, on rêve de tirer une balle entre les deux yeux de son géniteur. Sid s’est accoutumé à la souffrance, et il n’attend pas qu’on chiale avec lui – au contraire, sa douleur, parfois visible, imprimée sur l’épiderme, n’en demeurait pas moins intime, et jamais il n’aurait songé à se réfugier derrière l’étendard de la maltraitance afin de s’attirer la sympathie des uns et des autres. Ça se saurait, si les mandales justifiaient les écarts de conduite, et ça se saurait aussi, s’il pleurnichait sur son sort.
Un crissement de pneus. Il tousse, glaviote de l’hémoglobine sur le bitume et, mû par un minimum de dignité, essaye vaille que vaille de rouler sur le flanc mais ses membres ne réagissent pas aux ordres internes – il gît là, la tronche en vrac, à compter les étoiles dansant sous ses paupières. Au début de l’année, alors recraché par le système carcéral, il était parti s’acheter des clopes à la tombée de la nuit – avec ses écouteurs vissés dans les esgourdes, il n’avait pas entendu les provocations ricochant contre son dos et n’avait pas compris pourquoi il s’était soudainement retrouvé le cul par terre, à répondre aux crimes paternels, sous les godasses d’une meute de cabots réclamant justice pour l’un de leurs soldats. Il se souvenait à peine des visages – mais avait enregistré leurs menaces. De toute façon, personne n’irait pointer son cocard du doigt, et personne ne demanderait, dans quoi tu t’es encore fourré. Sidney divague. Les billes roulent dans leur orbite, tandis qu’un filet de sang lui salope le menton. Y a un arrière-goût métallique, absolument infâme, dans le fond du gosier. Ses mains se crispent sur l’abdomen, et il croit comprendre que la bande a pris la poudre d’escampette car Maura est près de lui, bien que ses paroles dénuées de sens se répercutent en écho sous sa boîte crânienne. Il réussit cependant à emprisonner l’un de ses poignets entre ses doigts avant de la lâcher aussitôt, à moitié conscient.
« Hold on, hold on. Can you get inside the car ? Can you – oh shit. » Une fois, son père l’avait salement amoché. Il ne se rappelait plus de ce qu’il avait pu dire à table pour provoquer une telle colère, mais une chaise était tombée, et il avait pris les jambes à son cou, poursuivi par Callum lui ordonnant de revenir ici sale petit con de merde. Il ne s’était pas relevé, ce soir-là. On avait dû le transporter à l’hôpital, Jean avait inventé un boniment qui éloignerait l’assistance sociale de leur dossier, mais personne n’était dupe – les blessures coïncidaient avec une sacrée raclée, pas à une malheureuse chute dans les escaliers. Qu’à cela ne se tienne, sa mère avait maintenu mordicus qu’il avait fait le mariole pour amuser la galerie et s’était empressée d’ajouter, à son attention cette fois-ci, tu vois où ça te mène, tes conneries ? Il avait hoché la tête, répété mécaniquement la version officielle, j’ai trébuché, je suis tombé. Fin de l’histoire. Vingt ans plus tard, il recouvrait péniblement ses esprits sur l’asphalte de West Savannah. Sa tête bourdonne, ses paupières refusent de se lever, et il a l’impression de pisser le sang par tous les orifices. « Come on, help me a little – fucking hell – shit, sorry, was that your hand ? It doesn’t look good. » Un bras se jette autour d’une paire d’épaules maigrichonnes, pas très solides. Il la casserait en deux, Maura, toute chétive qu’elle est sous ce tas de muscles secs. « No shit, » il parvient à grincer, en s’appuyant sur sa béquille de circonstance. Il se retrouve à nouveau assis, et le siège lui fait mal au dos (à moins que ce soit le pied qui s’est planté dans ses reins un peu plus tôt). L’esprit s’absente. Un flash noir – il a une brusque envie de dégobiller.

« (…) I’m just going home, that’s all. » Ses yeux se plissent. La tête dodeline mais il n’a pas la moindre idée de ce qu’il se passe à l’extérieur. « And what did you do this time? » La voix est lasse. Il devine – plus qu’il ne perçoit – la présence de son pote d’enfance, un bras sur le toit de la voiture. « Nothing, il croasse d’un ton convaincu. – I’m tired of your bullshit Sid, Jackson lève les yeux vers le jeunot en uniforme et s’abaisse davantage, we talked about this. » Il jouerait volontiers au con, rétorquerait, ‘bout what, comme s’ils n’avaient pas évoqué mille et une fois ses penchants autodestructeurs, sa propension à se mettre inutilement en danger lorsqu’il s’en allait fouler le territoire des lycans, et par-dessus tout, sa profonde et incurable connerie. « You’re the Pace girl, right? Maura, » il corrige, un doigt pointé dans la mauvaise direction. « C’mon Sid. Let’s go, il ouvre la portière, l’attrape par le bras. – Leave me the fuck alone.You need to go to the hospital, asshole. Have you seen your hand?Ain’t that bad. » Il parvient à se défaire de son emprise et reste là, sur ce foutu siège passager cabossé. Une lueur de détermination flotte derrière le voile grisâtre recouvrant sa rétine. « I’m staying with her. » (Peut-être que Maura aurait apprécié qu’on l’embarque loin de sa caisse – peut-être qu’elle négocie aussi, de son côté, mais il ne flanche pas, refuse d’être délogé de son nid, et à défaut de ressembler à un oisillon blessé, il a l’air d’un pigeon agonisant.) L’inspecteur, en civil, un badge brillant à la ceinture, s’écarte et contourne le véhicule arrêté. Le gyrophare apparaît enfin dans son champ périphérique, et il agrippe la poignée de maintien. Jackson échange brièvement avec Maura – faut qu’il se fasse soigner, et la bande là, y avait qui, ils étaient combien, ils conduisaient quoi. Il n’écoute pas, bascule dans un état de semi-conscience toutes les cinq secondes. Son prénom lui échapperait presque. Un flyer chiffonné a glissé de sa poche, parmi toutes les merdes qu’il trimballe sur lui – tickets de caisse, des morceaux d’aluminium arrachés d’un emballage de clopes, pas de papiers, quelques dollars froissés, et ces dépliants qu’il pique partout, comme s’ils l’appelaient à chaque fois qu’un présentoir bariolé de couleurs criardes promettait monts et merveilles à quiconque piocherait une brochure renfermant supposément une solution. La dernière en date était tombée entre les deux sièges de devant. The Coming Out Support Group: 5 Reasons Why You Shouldn’t Stay In The Closet. Chaque raison était associée à un bonhomme souriant et au dos, des bulles de témoignages vantaient les mérites du groupe sur fond d’acceptation de soi. Il avait trouvé ce flyer dans un refuge animal et l’avait embarqué sans savoir ce qu’il en ferait.

La camionnette roule.

« I already broke that hand when I was a kid, » il dit, en examinant les phalanges fêlées. Combien allait-il débourser pour un passage aux urgences ? Ça se remet, les os. Il immobiliserait sa main quelques semaines, ne reviendrait sans doute pas hanter West End de sitôt. Un sachet de légumes congelés, une attelle, l’affaire était réglée. Pas besoin d’un diplôme ou de justifier dix ans de médecine. « It’s bullshit, » l’arrière de son crane se cogne contre l’appui-tête, et il ferme les yeux. « Everything’s bullshit. Ain’t going to no hospital. » (Il devrait.) Outre la main, on lui a probablement pété une ou deux côtes, sans mentionner la commotion cérébrale. Il tire un pan de son t-shirt, découvre les marques violacées, presque noires, tavelant son torse, éponge les traces de sang de ses lèvres, essuie les narines. « But I deserve it, right? That kind of shit. I deserve it, » et n’était-ce pas là le mantra qu’il se répétait chaque soir. Il n’implore pas sa pitié – le constat est atone. « You seen Quinn recently? » Il ignore pourquoi son frère s’invite dans cette conversation à sens unique, ni pourquoi il s’entête à parler – chose inhabituelle, chez lui. Une fois les neurones déplacés, les vannes s’ouvrent. Faut croire. « He’s not talking to me. » Pas surprenant, connard. C’est ce qui arrive quand on se barre du jour au lendemain de la vie d’un môme de quinze piges, sans lui dire merci merde ou au revoir. Débrouille-toi morveux, ça ira. « I remember when he used to follow me everywhere, il voudrait une cigarette, mais n’a pas la force de tirer une tige de son paquet. And I’d tell him off. Fuck. » Il regrette leur complicité, si tant est qu’elle ait existé un jour. Il ne sait pas si son frère continue de parler à Maura depuis la découverte de son problème de fourrure – il ne connaît rien de sa vie, ou seulement ce que lui a confié Kitty. Si peu, finalement. Son regard atrophié glisse sur le profil de la conductrice, qui est devenue, en l’espace d’un instant, le seul lien le reliant encore à son cadet. « How’s Trish, huh? Why are you still in this shithole? » Il n’évoque pas Luke, qui croupit toujours derrière les barreaux. Ne l’interroge pas sur ses propres allées et venues – Maura n’était qu’une voisine collant son frangin. Elle avait des yeux globuleux et les genoux éraflés. Ils ont beau partager une poignée de souvenirs, il ne représente absolument rien dans sa vie, si ce n’est cette figure lointaine de chef de tribu ordonnant aux mômes de ne pas jouer près des chiens ou pansant les égratignures lorsqu’ils se mettaient à chouiner trop fort après s’être ramassés à vélo. Les frontières sont aussi floues que sa vision – parce qu’il se remémore surtout la fillette, pas la clébarde. Et il n’a pas la moindre idée de ce qu’on attend de lui – il sait qu’il ne parle pas à beaucoup de personnes, il sait que Maura n’en a sûrement rien à foutre de ses élucubrations, il sait qu’il ne récupérera pas Quinn. Il sait qu’il continue de saigner, qu’une douleur lancinante parcoure ses doigts figés. « I’m gonna throw up, » il marmonne, de la bille plein la bouche. Sa main valide cherche la poignée de la portière.
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Maura Pace
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moonchild
MessageSujet: Re: them lines. (money)    them lines. (money)  EmptySam 28 Nov - 0:05

Ses mains ont la tremblote alors qu’elle les replace sur le volant, dix heures dix, bien en vue, avant d’actionner son clignotant de façon exagérément lente et de quitter le trottoir dans un chuintement qui évoque un mollusque écrasé.
La gueule de Jackson lui est revenue seulement après qu’il se soit détourné de Sidney et planté devant elle, l’assommant de questions fusant trop vite pour son cerveau englué. Elle a répété I don’t know comme une adolescente prise la main dans le sac, cherchant désespérément la sortie la plus proche, soudain à court d’arguments devant les lumières corrosives du gyrophare. What happened? s’est enquis Tony, les sourcils en accent circonflexe et les reproches à peine voilés. What happened? lui demande une seconde fois Jackson, et le contournement de la vérité est un réflexe. Non pas qu’elle veuille couvrir l’aîné Farrow qu’elle ne connaît plus, et n’a sans doute jamais connu, mais dix ans de conneries dans les pattes de ses voisins plus quinze ans en transition perpétuelle lui ont appris à se méfier des types avec un badge et le pouvoir de lui sucrer sa précieuse liberté. Elle ne se souvient même pas de son nom de famille et parviendrait à l’ignorer même si on lui collait le nez devant sa boite aux lettres. « You’re taking him to the hospital?Yes. » (No. The fuck. Who can afford that?) Peut-être qu’il a participé à l’arrestation de Luke. Peut-être qu’au contraire, il est toujours de mèche avec les Farrow. Peut-être qu’il navigue entre les deux sans jamais savoir où se placer et qu’à chaque fois que l’occasion se présente, chaque fois qu’il a la possibilité de déguerpir et de laisser toute la clique du 393 loin dans le rétroviseur, il rebrousse piteusement chemin en blâmant ces putains de souvenirs. Qu’est-ce qu’elle en sait.

La voiture de patrouille reste plantée là, ses deux occupants scrutant attentivement son retour dans la Buick, alors elle n’a pas d’autre choix que de redémarrer et prendre la direction opposée censée les mener au Garden Mercy Hospital, le martèlement sous sa poitrine suivant le rythme du clignotant de la voiture. Sur l’interstate 516 quasi déserte, elle bifurque trop tôt et Sid s’anime à nouveau. Se met à divaguer. Parle, bordel, alors que c’est précisément le moment de la fermer. Elle n’arrive plus à s’entendre penser, le hamster pédale dans le vide, encore ébloui par les reflets rouge et bleu. « Everything’s bullshit. Ain’t going to no hospital.I know, just let me think. » Ce qu’il ne fait pas, mais est-ce bien surprenant. « But I deserve it, right? That kind of shit. I deserve it. » La surprise, plus qu’une approbation silencieuse, lui coupe la chique. Elle tourne brièvement la tête dans sa direction comme pour évaluer le sérieux de la déclaration, loupe le croisement suivant et fait mine de ne pas s’en apercevoir. « We both know you don’t. » Les ruelles délabrées de West Savannah ont depuis de longues minutes laissé place aux allées de chênes interminables typiques du centre, avec leurs mousses pendouillantes dessinant des monstres décharnés sous le clair de lune. « You seen Quinn recently?No. » Trop vite. Le mensonge, qui n’en est pas un, bien qu’elle passerait difficilement au détecteur avec cette inflexion dans la voix qui ressemble à un point d’interrogation, lui fait à peine cligner des yeux. Techniquement, en termes de rencontre en face-à-face, c’est la vérité. (Heureusement que l’obscurité masque ses pommettes en feu.) « He’s not talking to me. » Bienvenue au club, buddy. L’écho inattendu de ce constat lui fait presque regretter son silence buté post-combat, le mutisme de Sidney envolé maintenant qu’il n’y a plus de témoin pour aller dénoncer cette alliance grotesque Farrow-loup garou. A moins que ce ne soit la connivence qui suit une raclée partagée ? « I remember when he used to follow me everywhere. And I’d tell him off. Fuck. » Le feu met trois plombes à passer au vert et elle patauge pendant que des bribes de souvenirs s’invitent dans son champ de vision. Sid avachi dans le canapé du basement avec Jackson, un nuage atomique au-dessus de leurs têtes et la paire d’yeux complices qui les observe depuis la lucarne ouverte – une insouciance presque tendre, à des années lumières de cette soirée abominable. Depuis son retour à Savannah, dès qu’elle croise une tête connue et mesure le fossé qui les sépare désormais, elle a simultanément envie de creuser sa tombe et de se barrer en courant. « I know » qu’elle répète comme un automate, concentrée sur la route. « How’s Trish, huh? Why are you still in this shithole?My mum… is in a very good shape. » Ça lui tire un sourire de travers, au milieu de ce bordel. Parlons de Trish. Callons ce sujet fourre-tout pour pouvoir atteindre l’autre rive. « Found herself a new guy, the usual type, very nice… He welcomed me with a shotgun last December. Typical Christmas greetings around here, am I right?I’m gonna throw up. » Le sarcasme prend aussitôt l’eau alors que son pied écrase la pédale de frein et que Sidney ouvre la portière juste à temps pour se vider les entrailles sur le pavé. Le pick-up qui leur collait au train évite de peu la collision – il les dépasse brusquement avec la paume écrasée sur le klaxon.
A la lumière du plafonnier, Maura cherche à tâtons la boite à mouchoirs située quelque part au milieu du capharnaüm rampant sur le plancher, entre les deux sièges, ou dans le boîtier de rangement bancal, ou en équilibre au-dessus d’un gobelet-cendrier à l’odeur tenace. Ses doigts trouvent d’abord un morceau de papier qu’elle regarde à peine avant de le balancer impatiemment sur le tableau de bord, puis elle replonge la main plus loin sous les sièges et – ouch, what the hell – en ressort avec un bout de verre émeraude planté dans la main. Tout en se débarrassant du débris de bière par la fenêtre ouverte, sa main sonde à nouveau le bordel sous les sièges, une traînée de sang se déposant sur chaque objet assez malheureux pour avoir terminé sa course dans cette bagnole en fin de vie, jusqu’à ce qu’enfin, la boîte écrasée atterrisse entre ses doigts. (Un jour, elle déblaiera cette voiture de fond en comble. Probablement juste avant de l’emmener à la casse.) Elle agrippe quelques mouchoirs avant de reposer sa paume sanguinolente sur le volant, balance la boîte sur le siège arrière après en avoir sorti une dizaine pour Sid. « Here. You good? We’re not very far now. I know a doctor and hopefully he’ll be able to help out.  (Elle n’a aucune idée si Javier pourra se déplacer, s’il pourra lui donner quelques instructions, s’il ne l’enverra pas chier, même.) We need someone to look at that hand. » We, comme si ce duo de bras cassés monté à la va-vite n’était pas une parfaite illusion.

Les roues de la Buick s’arrêtent en grinçant devant un cabanon de jardin flambant neuf, planté au fond de l’allée de Tim Montoya et les protégeant des voisins trop curieux. Au-dessus d’eux se dressent les deux étages d’une maison typique de Chatham Crescent, vue de l’arrière, avec la porte vitrée de la cuisine donnant sur un porche minuscule au-delà duquel s’étend un jardin coquet, réduit à une étendue menaçante dans l’obscurité qui les entoure. Les lumières à l’étage sont allumées, attestant de la présence du propriétaire, et alors que son cœur devrait se serrer devant les complications et conséquences de son imprudence ce soir, un interrupteur semble s’éteindre dans le cerveau de Maura, enclenchant pour de bon le mode fuck it. Chancelant sous le poids de son acolyte, elle décrit le chemin en chuchotant comme elle le ferait pour un aveugle, avec anticipation et douceur, autant pour ménager Sidney que pour éviter de réveiller le voisinage. « There’s gonna be a step, alright, we’re almost there, now a gate – wonderful – now about eight steps, one, two, keep going… and we’ve reached the door. Okay, let’s take a break. » Elle le laisse sur le banc en dessous de la fenêtre le temps de dénicher la clé, d’habitude coincée derrière un pot de fleurs solitaires crevant gaiement dans un coin, et bataille bien plus que nécessaire à l’aide de la torche de son téléphone avant de réaliser qu’elle les a gardées dans sa voiture depuis la dernière fois. « I forgot… Hold on. » Elle redescend à toute vitesse le chemin menant à la Buick, arrache presque la poignée de la boîte à gants et se met à fouiller frénétiquement à l’intérieur, tâtonnant entre les morceaux de papier, un gant solitaire, la crosse du Taurus planquée au fond, un tas de brochures éparpillées, du plastique, des élastiques, des emballages vides… jusqu’à mettre la main sur une unique clé rattachée à un anneau de ferraille. Par réflexe, elle veut aussi ranger la brochure traînant sur le tableau de bord parmi les autres flyers qui constituent sa panoplie de Cause Désespérée et récupérés tout au long de sa longue fuite hors de Savannah mais marque un temps d’arrêt sur le titre. The Coming Out Support Group: 5 Reasons Why You Shouldn’t Stay In The Closet.
Un bug.
Avant de laisser tomber la brochure sur le siège (teintée de vermeil dans le coin, là où elle l’a ouverte puis retournée avec curiosité), d’attraper la clé et de refermer la portière.

Ce n’est qu’en le traînant jusqu’au salon qu’elle prend conscience des tâches sombres sur leurs vêtements, du t-shirt de Sidney qui ressemble à un torchon et sur lequel elle a elle-même imprimé des empreintes cramoisies en l’aidant à grimper les marches du porche. L’un s’est fait briser la main par un abruti de lycan, l’autre s’est pris un tesson en plein milieu de la paume. Et cette fine équipe débarque chez le prof d’anglais en titubant comme des ivrognes. « You know what? Let’s stop by the bathroom first. » Ils passent sous les escaliers et se cognent dans le couloir qu’elle a oublié d’éclairer avant de pousser la porte d’une salle de bain exiguë ressemblant davantage à une buanderie qu’à un véritable lieu de vie. Les chemises qui sèchent sur leurs cintres sont pareils à des fantômes au garde-à-vous, alignés à la perfection, et si elles n’étaient pas toutes blanches Tim les aurait sans doute méticuleusement étendues en dégradé de couleurs. Elle fait glisser Sid contre le rebord de la baignoire à une distance raisonnable de la cuvette des toilettes, puis recommence sa fouille méthodique des lieux en vidant sans cérémonie les placards de médicaments dans l’évier. « Pills, pills, pills, let’s find some pills... He keeps good stuff. And we need to call his– Une porte claque au loin. – Maura? » Les billes sont fuyardes, la voix gonflée d’une assurance feinte. « Let me handle this. I got this. I–  » Lorsque tard Tim apparaît dans l’encadrement de la porte, ses sourcils font un bond à la vue du carnage. « What are you… doing? What happened?  – I’ll explain later, can you call your cousin? Ask him if he can come over and have a look? Please.  – What happened to your hand?  – Just call him, ok? I don’t know what’s broken, I just- I think he lost consciousness a few times and…  – We should take him to the hospital.  – … and I can’t take him to the fucking hospital.  Elle n’avait pas l’intention de hausser le ton mais le stress cumulé à l’urgence a cherché la sortie de secours la plus proche. Et sa manière de dévisager Sidney Farrow… L’incompréhension, le vague écœurement et les relents de déception qui planent dans l’air sont autant de raisons qui la poussent à être la plus expéditive possible. I’ll wash the stains tomorrow, don’t worry, it’s nothing, it’s fine, he’s absolutely fine,  (si elle le répète en boucle peut-être qu’elle parviendra à se croire elle-même) just gonna wash the blood and we’ll be out of your hair. Can you call him now, please?  » Ses mains fébriles trouvent des compresses, du désinfectant et un carré éponge d’un blanc éclatant qu’elle imbibe d’eau en s’accroupissant, inspectant l’air de déterré de son compagnon de fortune sans avoir la moindre idée de l’endroit par où commencer. Dans son dos, Tim reste planté encore quelques secondes sur le pas de la porte avant de s’éloigner.

Le sang mélangé à la crasse du bitume sous le menton de Sid s’absorbe péniblement dans la serviette mouillée. Et au tour de Maura désormais de déblatérer comme une idiote afin de garder son attention, qu’il se laisse soigner, qu’ils oublient tous les deux l’anomalie de cet instant et ce qui les a conduits jusque-là. « So this is Tim. » Un sourire penaud étire ses lèvres tandis qu’elle approche le tissu de son arcade désormais disparue sous une croûte de sang. « And right now he’s your best chance at getting a free medic. It’s easy, and it requires only a little bit of… lying. Elle termine sur un murmure, si concentrée sur sa tâche qu’elle en oublierait presque la panique qui continue de la faire trembler des pieds à la tête. So we’re just gonna try and be… very nice to him. Think of him as, like… your probation officer. A necessary evil. A gateway to the Good Doc. Putain mais qu’est-ce qu’elle raconte. You just need to stay awake for now. » Alors qu’elle se redresse pour essorer la serviette, Tim réapparaît à l’entrée de la salle de bain, aussi pâle que ses chemises, agitant son iPhone dernière génération en guise de preuve de sa coopération. « I’ve tried a few times, no answer.Can you try again? » Pas vraiment un exemple de la gentillesse incarnée, alors elle se reprend, ajoute un malheureux « Please? » qui sonne creux avant de réceptionner le sachet de petits pois congelés que lui balance Tim avec un soupir excédé. Elle évite soigneusement son regard, préférant fignoler l’arcade sourcilière de son cobaye et ignorer les reproches qu’elle arrive presque à renifler – il a reconnu le cachet West Savannah, évidemment. Il a enseigné l’anglais à Nickie et à Quinn et connaît trop bien leur histoire pour considérer les familles Pace et Farrow comme deux entités indépendantes. Elle devrait s’engager dans des explications, brèves mais concises, prendre le temps de casser les hypothèses en train de se construire dans son esprit et barrer la route au cheminement tordu qu’il est train d’emprunter mais elle est juste bonne à attraper un verre d’eau et à le glisser entre les doigts recroquevillés de Sid pendant que Tim repart dans le salon. Cale une gélule censée couper la douleur dans sa paume intacte. Non, quatre. Deux pour lui, deux pour elle. Attrape une nouvelle serviette dans laquelle elle enroule le sac de billes. Puis s’assoit à même le sol comme pour essayer de retrouver un contact tangible avec la réalité. « That’s funny. Quinn once gave me frozen peas for a bruise I had. A lifetime ago. I hate peas. » La brume qui s’empare de son cerveau est semblable à celle qui l’a laissée figée devant cette brochure, dans sa voiture, et dont elle n’est plus certaine de savoir si elle l’a imaginée ou si elle l’a réellement eue entre les mains. Une vague perception en marge de la nuit, aussi confuse qu’un mirage. Elle lève des yeux de chiens battus vers Sid, vidée de son aplomb. « Anyway, I’m not taking you anywhere else tonight. You need to rest. Puis elle gobe ses deux cachets avant de s’emparer des compresses, du désinfectant, et commence la phase numéro deux du secourisme improvisé. Do you need to call someone? »

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Sidney Farrow
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flesh and bones
MessageSujet: Re: them lines. (money)    them lines. (money)  EmptyMer 9 Déc - 10:30

Il ouvre brutalement la portière et dégobille par terre : tout y passe, du sang, de la morve, les restes d’un porridge avalé à la va-vite en début d’après-midi, et un filet de bave s’accroche au menton piqué de follicules pileux drus. Saloperie – il en a la larme à l’œil, le corps brisé en deux, à expectorer l’intégralité de ses intestins sur le bitume. Il s’essuie lamentablement la bouche à l’aide d’une serviette en papier que lui a déniché Maura avant de réprimer un hoquet infâme. Le front et la nuque moites, il se tasse sur le siège passager, et ne remarque pas le reflet de son teint verdâtre dans le rétroviseur. Vaut mieux, il a vraiment une sale gueule. Son poignet éponge la sueur qui lui lèche les tempes, et il sait, sans avoir à le sentir, qu’il empeste la mort. Pire qu’un clébard trempé, et l’ironie mordante de la situation lui fait ravaler de la bille dans une espèce de gémissement las. Il se racle la gorge, récupère les mouchoirs jetés pêle-mêle sur ses genoux tordus – puis se démerde pour descendre la vitre, semant les carrés de papier souillés sur les traces du véhicule. (Comme si Farrow se souciait de la pollution, du réchauffement climatique, du trou dans la couche d’ozone, de la disparition des ours polaires, de Greta Thunberg ou de l’écologie en général ; et ma bite sur ton épaule, il répliquerait à quiconque le sommerait de trier ses putains de déchets.) « Here. You good? We’re not very far now. I know a doctor and hopefully he’ll be able to help out. » Qu’est-ce qu’elle lui chante. Cependant, il n’a pas envie qu’elle le ramène chez lui – et n’a pas non plus la force de protester. « We need someone to look at that hand. » Ce serait foutrement con qu’après dix ans de service militaire et un nombre incalculable de missions ayant manqué de l’estropier, il perde l’usage de sa main à cause d’une altercation avec des cabots plus jeunes que ses cadets. Le membre, recroquevillé au creux du bassin, tressaute à peine. Ses doigts forment des angles aussi étranges que cubistes, comme si un poivrot ayant un vague intérêt pour la sculpture avait réarrangé ses segments osseux après un verre de trop. « I miss him sometimes. Quinn, » c’est un murmure inaudible, une parenthèse démente, qui ne raisonne pas plus sous son crâne que sur sa langue pâteuse. Ils ne retrouveront jamais la complicité, encore moins l’intimité, qui furent la leur à une époque – lointaine désormais, et il coule un regard sur le profil d’une Maura crispée.

Ils s’arrêtent, et en infirmière bienveillante, elle lui ouvre la portière, le hisse sur ses jambes flageolantes, le traîne sur le chemin à l’instar d’un soldat rapatriant son camarade blessé au terme d’une épopée rocambolesque (ou tout bonnement ridicule, si l’on examinait toutes les cases qu’ils avaient cochées depuis le réveil – en substance, un sacré paquet de décisions merdiques couronnant des choix de vie tout aussi peu réfléchis). « There’s gonna be a step, (il lève machinalement le pied droit) alright, we’re almost there, now a gate – wonderful – now about eight steps, one, two, keep going… (son bras pèse sur le Minimoy lui servant de béquille, et les guiboles peinent à suivre le rythme, un, deux, trois, chaque pas lui demande un effort démesuré) and we’ve reached the door. Okay, let’s take a break. » Ses fesses heurtent un banc, et il se dit, ça y est, c’est là que je veux crever – mais non, à peine s’habitue-t-il au confort relatif de son assise en teck qu’elle le soulève à nouveau, et il n’est plus qu’une lourde poupée de chiffon, option hémoglobine plus vraie que nature, éclaboussures de dégueulis sur le menton ; occupe-toi de ton Farrow, remets-le sur pied ou laisse-le clamser dans le caniveau. Jingle publicitaire à suivre. Il se cogne contre un guéridon ou une commode, peu importe – la lumière vive et blanche d’une salle d’eau l’oblige à cligner violemment, sa main brisée en visière. Tout est beaucoup trop immaculé, mais le carrelage a le mérite de lui apporter toute la fraîcheur dont il a besoin. Maura trifouille encore, ouvre et ferme les tiroirs, secoue des flacons de gélules, repose des trucs et des machins qui, en dépit de leur taille moindre, produisent un boucan considérable dans ses oreilles bourdonnantes. Il était quasiment sourd du côté droit, depuis une patrouille foirée à Helmand. L’explosion d’un EEI lui avait coûté un genou, un conduit auditif et deux copains, et à chaque fois qu’il accusait un coup de trop à la tête, son tympan sifflait des heures entières.
Il divague. Le menton s’échoue sur la clavicule et bien qu’il respire correctement, il a l’air d’un cadavre attendant l’arrivée des pompes funèbres. Il n’entend pas l’échange entre Maura et un deuxième individu, n’essaye pas de lutter contre la fatigue et la lassitude. « So this is Tim. » Les paupières closes – ou est-ce le cocard violacé donnant cette impression –, il incline sa tête vers le côté d’où provient la voix de l’acolyte. « … your probation officer. A necessary evil. A gateway to the Good Doc. You just need to stay awake for now.What are you talking ‘bout. » Elle s’active, le débarrasse du sang séché, de la saleté qui s’est glissée dans les blessures, sans redonner à son visage tumescent un air humain. Finalement, n’est-il pas le plus monstrueux. Un verre d’eau lui échappe de la main et se déverse à moitié sur le carrelage. « That’s funny. Quinn once gave me frozen peas for a bruise I had. A lifetime ago. I hate peas. » Il a pour elle un regard chargé de tout ce qu’il est incapable dire – de la mélancolie, une tristesse à en broyer les tripes, et l’étendue du désastre ambulant qu’il était explose dans cette simple œillade désemparée. Il ignore pourquoi ses doigts valides s’emparent du poignet gracile de Maura et le serrent si fort que la marque de ses phalanges ne tarde pas à s’imprimer sur le derme. Il la lâche aussitôt. « I used to do that, il marmonne d’une voix éraillée. Sa nuque se cale contre le rebord de fonte blanche. « When the hell did I go wrong. » Elle ne répond pas, à raison : autant le laisser gamberger en paix. « Do you need to call someone? » Un éclair de lucidité le frappe – ou un réflexe, plutôt. Il n’imagine pas prévenir Quinn, ou Nickie, ne veut pas inquiéter Kitty, probablement en train de pioncer à poings fermés après une journée de boulot, Jax bosse, ses autres connaissances sont des blaireaux qui n’ont jamais bougé le petit doigt pour lui – « Ally, » il marmonne, et joignant le geste à la parole, il tire son téléphone d’une poche de jogging, déverrouille à grand peine l’écran principal et le pouce glisse sur l’icône vert du combiné, surmonté d’une pastille rouge indiquant sept appels ou messages manqués. La page de numéros favoris comportait seulement six contacts : Kitty, Jax, Nickie, Ma, Ally, Quinn. Il tend le smartphone à sa compagne d’infortune, « she’s my sponsor. » Sponsor de mon cul oui, à en juger sa consommation d’anxiolytiques et de somnifères arrosés de bière. Il était bon pour une réunion de Narcos Anonymes dès qu’il serait sur pied. « He’s on his way, le type lance, (depuis quand… merde, il s’en branle,) seventh time’s a charm. » Le sarcasme pique. Maura s’active auprès de lui, lui tamponne maladroitement la figure, et il la confond avec Kitty, alors qu’il n’y aucune trace de sa sœur dans la bouille de Maura, si ronde qu’on lui donnerait le bon Dieu sans confession, avec ses billes céruléennes flottant dans deux orbites globuleuses. Il s’est longtemps demandé si elle et Quinn avaient eu quelque chose, un embryon de rien, parce qu’ils faisaient bien la paire, gamins.

La sonnette de l’entrée retentit, suivie de quelques coups brefs portés contre le battant. Il a le cul bordé de nouilles, vraiment : Javier Morales dormait sûrement moins que lui et sans doute ne pouvait-il pas résister à un cas désespéré, avachi sur le carrelage d’une salle de bain, le nez en charpie, l’arcade sourcilière explosée et du sang lui coulant davantage sur le t-shirt que dans les veines. Mais c’est tout Sid, ça. Il broyait du noir à longueur de journée pourtant, après plusieurs missions dans les fournaises irakiennes et afghanes – dont Kamdesh –, il était bien vivant. Accro à des merdes plus ou moins approuvées par le FDA, certes, la caboche détraquée, oui, mais il respirait. Le toubib prévenu à l’arrache s’approche prudemment, une trousse noire sous le bras, et Sid n’y voit tellement rien qu’il se fait supplanter son rôle de narrateur. « Es el soldado loco del West Station, » il entend. Trop assommé, il distingue simplement une silhouette massive, qui s’étire au niveau des épaules, et le froissement d’un blouson en cuir lorsque le type s’accroupit en face de lui. Une paire de doigts palpe le visage tuméfié : mâchoire, œil (yeux ?), pommette… Une loupiote lui agresse violemment la cornée, « no te ves muy bien, amigo, ¿eh? » Il se fout de sa gueule. Il croirait entendre son pote, le sergent Emiliano Morterero, surnommé « Vato » parce qu’à force de brailler ce sobriquet à droite et à gauche, c’était devenu le sien. Morterero cuisinait comme un putain de chef cinq étoiles – il leur avait sauvé la mise plusieurs fois dans les cantoches pourries où ils atterrissaient, l’estomac tiraillé par la faim (même s’ils avaient vu un copain cramer dans son convoi à neuf heures du matin), et était capable de confectionner un véritable festin à partir de pas grand-chose, du moment qu’il avait de quoi faire cuire ou mariner ses ingrédients. La technique, il disait, c’est les épices, « y’all white people don’t know how to season your food », et Farrow se marrait, se remémorant les quantités inquiétantes de plats cuisinés que sa mère ramenait de Target. Morterero était un Californien d’origine hondurienne ; Sid avait encore ses idées de péquenaud à l’époque, et lorsqu’ils commencèrent à s’affronter sur le terrain glissant des clandestins, l’autre eut tôt fait de le remettre à sa place de raciste poltron. Puis ils avaient débattu sur Star Wars pendant cinq heures. Un tireur embusqué a descendu Morterero en 2008, au cours d’une patrouille. Il se souvient de son corps criblé de balles se dégonflant à ses côtés, alors qu’il pointait son Colt M4 sur le décor rocheux où rien, foutrement rien, ne trahissait la présence d’un taliban. Quelque chose avait sifflé près de son oreille et bientôt, son épaule s’arracha littéralement – il ne se rendit pas compte, ou peut-être eut-il si mal que la douleur se confondit avec la stupéfaction. Toujours est-il qu’un connard lui avait tiré dessus, que son uniforme se teintait de rouge, et qu’il continuait à braquer son semi-automatique en l’air. « Right now, can’t do much with your hand, man. You’ll have to go to the hospital first thing in the morning.Fuck off, » sa tête dodeline connement, à l’instar d’un môme récalcitrant. Son corps coule contre la surface carrelée de la baignoire, « I just need Fentanyl.Woulda bet you were a Fentanyl type of asshole, » l’autre répond dans manquer un battement, fin connaisseur des drogues de mauvaise qualité inondant les artères urbaines dont il provenait – la crise des opioïdes s’était instillée dans les ramifications les plus moisies du clan, parce que s’il fallait pousser le cliché à l’extrême, autant semer des seringues dans le sillage d’une poignée de tarés. Sid n’était pas le pire. Y avait eu Jed, son oncle, comparable à un clébard enragé que son père aurait fini par descendre « accidentellement » si l’occasion s’y était prêtée. Donnie, son cousin, plus défoncé qu’un terrain de manœuvre. Lui, l’ex-vétéran, dont la cure de désintoxication, gracieusement payée par un gouvernement se battant les couilles de son existence, avait seulement marché le temps d’une peine carcérale. Une fois les plaies désinfectées, à grand renfort de cotons imbibés d’alcool, et le sang épongé, il ressemble à nouveau à un humain en piteux état. On lui manipule doucement la main, le poignet, on lui palpe les côtes, et il déteste, putain, il déteste qu’on le touche, qu’on soulève le t-shirt, qu’on l’ausculte. « And if that can be a lesson, stop messing around with werewolves. » Il lui foutrait bien son majeur dans l’œil s’il pouvait le déplier. À l’extérieur, un troisième véhicule s’arrête, et une portière claque. Le propriétaire se retire dans l’entrée, reparaît flanqué d’une présence connue, dont le filet de voix désolé le tire des limbes. Ally Southwell était une brune au regard clair et perçant, se séparant rarement d’un blouson en jean Levi’s, pièce chinée dans une friperie du Kentucky, lui avait-elle dit un jour. « Again I’m so sorry to—oh fuck me. What happened? » Ses rotules heurtent le sol et elle lui harponne le menton, « have you been fighting again? God. » Contrairement au toubib ou à Maura, ses gestes ne sont aucunement empreint de douceur ou de précaution : elle le tire par le bras sans s’enquérir davantage de son état, passe un bras autour de son taille, égrène un chapelet d’insultes méritées, et se tourne vers la troupe disparate : « thanks for taking care of this mess. » Ally est polie – pas le temps de mener une enquête approfondie, d’obliger Blondie à décliner son identité, de trouver un autre coupable que la connerie pathologique de Sid Farrow. Sur le chemin de l’entrée, elle s’excuse platement, encore et encore, auprès du fameux Tim – I’m so sorry, elle répète comme un disque rayé, if you need me to pay for something, et il répond que non, pas de problème.
La suite des évènements est dépourvue de sens. Le chuintement d’une ceinture, le crachotement d’un moteur, un son de country provenant d’une radio à l’ancienne, l’odeur tenace de tabac froid imprégnant l’habitacle. Le dernier trajet d’une nuit interminable se déroule dans un flou troué de lumières extérieures : les devantures encore allumées, les lampadaires, les phares balayant la route presque déserte. La tempe écrasée contre la vitre fraîche, il s’enfonce dans les affres de son inconscient jusqu’au moment où le moteur s’arrête, dans une petite allée de garage planquée entre deux lotissements de taille moyenne. Ally l’aide à s’extirper de la carcasse de ferraille qu’elle ose appeler voiture, et le guide à l’intérieur. « Gonna leave you on the couch and we’ll go to the hospital in the morning. » À peine allongé sur le canapé, il sombre, un cheveu blond de Maura accroché à l’épaule.
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