what will it take to make you capitulate / layla

princesses don't cry / Son monde s'écroule le jour où la madre meurt. Le compound, quartier général du coven Zapien, jusqu'alors son terrain de jeu — palais dont elle est ni plus ni moins la princesse — devient le théâtre d'une interminable veillée funéraire. Le deuil s'éternise, la douleur aussi. Layla a du mal à encaisser les gens qui pleurent, comment peuvent-ils lui voler ses maux, après tout eux n'ont pas perdu leur mère. Le cancer qui la consume est si fulgurant que la gamine se souvient à peine des quelques semaines entre la découverte d'une tumeur et les derniers souffles. Elle est dans la pièce, quand sa mère part, essayant désespérément de la retenir, forçant sur des pouvoirs à peine déclarés, jamais encore utilisés. De toute façon, ça ne sert à rien, le coven tout entier n'est pas assez pour sauver sa meneuse. Le compound ne s'écroule pas, pourtant Layla ferme les yeux à s'en fendre les paupières, priant pour que Nuestra Señora de Guadalupe ouvre la terre et avale la bâtisse tout entière. Elle n'a pas de père, pas de vraies soeurs, juste les autres merdeuses de la congrégation à qui elle a envie d'arracher les yeux quand vient la mise en terre. Layla ne hurle pas, ne sanglote pas, alors toutes les démonstrations, toutes les effusions, la débecte chaque jour un peu plus. Debout devant la tombe, elle est seule ou presque. La seule qui peut partager sa peine, la seule autorisée à souffrir autant qu'elle, c'est tia Adriana, trop jeune pour tout ce qui lui tombe dessus d'un coup.

hell is a teenage girl / Layla ne veut pas vraiment régner mais ça lui plait d'instaurer la terreur, elle aime quand on s'écarte sur son passage, quand on baisse les yeux face à sa resting bitch face. Elle n'est pas plus importante qu'une autre mais dans les couloirs du lycée, elle se fait respecter et personne n'ose l'emmerder, sale teigne au caractère explosif, aux injures qui font mal, aux regards plein de jugement. Elle est redoutable, comme savent l'être les queen bee, consciente du cliché ambulant qu'elle incarne mais trop ivre de son influence pour s'arrêter. Elle a quinze ans et c'est la dernière des terreurs, toujours entourée de son petit groupe, witch bitch en puissance qui se pavanent dans Savannah en riant trop fort, avides d'attention et de provocations. Elles savent qu'elles doivent montrer l'exemple, qu'elles représentent le coven mais voilà, difficile d'être raisonnable quand on a l'insolence de la jeunesse. Elle vit des informations qu'elle peut avoir sur les autres, capable de tirer aux gens leurs secrets en quelques battements de cils. Ça lui confère une autorité malsaine, la notion d'être à même de détruire la réputation de quiconque l'emmerde.

kiss the boys and make them die / Elle ne l'aime pas particulièrement, le garçon avec qui elle sort, mais il lui donne l'impression d'être plus âgée qu'elle ne l'est réellement alors elle s'y accroche, jouant même les chieuses possessives parce que toutes les excuses sont bonnes pour faire une scène ou s'en prendre à une concurrente dont le regard traîne un peu trop. Elle va trop vite, Layla, elle veut grandir, elle veut être adulte, elle veut être libre. Elle n'est pas mature pour autant, parce que lorsqu'elle l'entraîne dans sa chambre pour qu'il lui prenne sa virginité, elle se dit surtout que ça va bien agacer Adriana. Ce n'est pas tant qu'elle en a envie, de coucher avec lui, juste qu'elle s'ennuie, qu'il faudra bien passer le cap un jour. Alors, sans plus de cérémonie, elle obtient ce qu'elle veut, comme toujours. Le problème c'est que ça tourne vite au drame. Elle a beau laisser couler un hurlement d'horreur, rien n'arrête le sang qui dégouline des oreilles et du nez du garçon inanimé. Ecroulé au-dessus d'elle, fauché en plein vol, il meurt sur un râle dégueulasse tandis qu'elle peine à se dégager, coincée sous son cadavre, poids littéralement mort. Du haut de ses dix-sept ans, elle passe devant le conseil, doit répondre de ses actes. Humiliée face aux responsables qui parlent de sa vie privée, elle se braque complètement, bloque toutes les discussions. Elle s'en sort, pourtant, parce qu'Adriana explique ce qu'elle a découvert. Atteinte d'une forme d'endométriose, Layla rentre en conflit avec sa magie, ses pouvoirs qui veulent viscéralement soigner et voient les contacts comme une agression, une plaie à résorber, une plaie à éradiquer. Son intimité est un piège dans lequel le pauvre humain s'est tué. Elle n'y est pour rien, ne pouvait pas savoir. Elle jure à moitié, dents serrées, de ne pas recommencer et tente de ne pas le revoir, mi-rupture d'anévrisme, à chaque fois qu'elle ferme les yeux.

blood in the water / Pendant qu'ils l'examinent et la juge, les membres du conseil découvre son talent d'orfèvre. Encore naissant, il est bancal et elle ne sait pas l'exploiter. Par intérêt, ils tentent de se servir d'elle mais il se trouve qu'elle n'est pas très douée pour faire des bagues de jour alors ils la congédient et la laisse vaquer à ses occupations, elle n'est pas utile, pas importante pour eux. Par défiance, alors, elle s'y intéresse et découvre sa force, les bijoux de lune s'illumine sous ses doigts, se transforment sous ses mains. C'est illégal et elle méprise les lycans mais ce n'est pas la question. Les pièces qu'elle fabrique lui rapportent bien vite de l'argent alors tant pis pour les principes, tant pis pour la morale.

meet me on the battlefield / Les relations sont compliquées pour Layla. Elle ne peut pas se permettre de laisser qui que ce soit approcher réellement. Elle flirte, joue les allumeuses, les filles faciles et puis sur ce qui ressemble à un coup de tête, un revirement de situation désagréable, elle se barre sans demander son reste, plantant ceux avec qui elle fait mine de jouer sans aucun scrupule. Elle ne peut pas prendre le risque de recommencer ce qu'il s'est passé dans sa chambre, c'est tout simplement inconcevable. Le traumatisme est encore là, il la hante, elle peut encore le voir saigner, le voir mourir... Alors elle est distante, froide, cassante, assez pour qu'ils se sauvent d'eux-mêmes, ceux qui voudraient l'approcher. Sauf Caleb. Evidemment. Saleté de loups, foutu lycan à qui elle a vendu un bijou de lune et qui lui prend la tête bien trop souvent. A chaque fois qu'ils se croisent, ça se passe mal, comme s'ils n'étaient pas foutus de parler sans s'agresser, sans se sauter à la gorge. Il l'exaspère, elle a envie de lui arracher ses regards arrogants, son sourire suffisant. Pourtant, les heurts prennent parfois un autre tournant. Au fond des engueulades, il y a autre chose, une énergie à la con, indomptable. Combien de fois se sont-ils à moitié sauté dessus, combien de baisers brusques et chaotiques, combien de fois s'est-elle empressée de le mordre, avide et furieuse ? Pour le moment, elle a toujours réussi à suffisamment garder le contrôle, histoire d'éviter la catastrophe mais plus ça va, plus elle s'efforce de le haïr et plus elle le hait, plus les colères sont intenses et plus les rapprochements sont violents, pente glissante d'une hargne aux conséquences potentiellement dramatiques.